lundi 17 février 2025

Issa ASGARALLY (Maurice) chronique un livre de Gilbert LAZARD consacré à Omar KHAYYÂM...

 



Cent un quatrains de libre pensée, de Omar Khayyâm, traduit du persan et présenté par Gilbert Lazard, éditions Gallimard.




Mathématicien, astronome, philosophe et poète, Omar Khayyâm vécut de 1048 à 1131. En 1074, il fit partie de l’équipe d’astronomes chargée par le sultan Malek Shah d’installer un observatoire. Il est l’auteur d’ouvrages importants dans l’histoire des sciences et jouit durant sa vie d’une grande réputation de savant et de philosophe, qui a traversé les siècles.
Gilbert Lazard, qui a traduit du persan Cent un quatrains de libre pensée, rappelle que la première collection systématique comprend 158 quatrains et que c’est un manuscrit de la Bodleian Library d’Oxford, daté de 1460, près de trois siècles et demi après la mort de l’astronome-poète. Par la suite, les recueils se multiplient et en même temps s’amplifient.
Le traducteur rappelle également que le thème bachique, si présent dans la poésie d’Omar Khayyâm, est issu de l’antiquité iranienne, où le vin est associé à la jeunesse, à l’amour, au plaisir, à la vie et au renouveau printanier. Dans la poésie persane classique, ce thème revêt de nombreuses significations symboliques. Chez Omar Khayyâm, l’invitation à boire est un appel à vivre pleinement et à chercher l’éternité dans l’instant. Le poète nous invite à oublier, si nous pouvons, dans ces joies éphémères, la fuite du temps, l’imminence de la mort, l’absurdité du monde et la cruauté du destin. C’est le fondement philosophique de la morale hédoniste souvent prêtée à Omar Khayyâm.
De ce vert gazon, mon cœur, et de ces fleurs de printemps / Jouis ; une semaine encore a sombré dans le néant. / Bois le vin, cueille la fleur : tandis que tu considères, / La rose devient poussière et la verdure sarment.
Cette insouciance apparente est délibérée, car elle doit prévaloir sur les sombres pensées. Ce que défend Omar Khayyâm, c’est un art de vivre sagement, parmi des amis choisis qui sont lucides comme lui et qui goûtent les mêmes plaisirs délicats, à l’écart de la vaine agitation du monde en attendant le départ inévitable.
Comme l’eau dans les ruisseaux, comme le vent du désert, / Un jour encor de mon lot déjà s’enfuit et se perd. / Passent les jours ! La pensée ne saurait troubler mon cœur / Du jour qui n’est pas encore et du jour qui est passé.
Le thème du potier, qui revient souvent dans les quatrains d’Omar Khayyâm, illustre l’urgence de vivre au présent. Puisque la terre est faite de la substance des morts qu’on y enfouit, c’est leur argile même que le potier pétrit. Et les corps vivants seront bientôt cruches ou jarres.
Ce pot de terre jadis fut un amant passionné / Dont le cœur était captif des boucles d’une beauté / Et cette anse qu’aujourd’hui tu vois à son col, c’était / La main dont il caressait le cou de sa bien-aimée.
L’univers d’Omar Khayyâm, souligne Gilbert Lazard, n’est donc pas un monde bien ordonné dont l’homme occupe le centre et où il chemine sous le regard bienveillant de la Providence divine, en attendant, s’il est vertueux, de jouir de la félicité éternelle. L’homme n’y est que le jouet de forces incompréhensibles.
En vérité très exacte et non point par métaphore, / Nous sommes des marionnettes dont le Ciel est le montreur : / Sur le théâtre du Temps nous faisons trois petits tours, / Puis retombons tour à tour dans la boîte du Néant.







Issa ASGARALLY.









































Source : Issa ASGARALLY.
























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