mercredi 5 mars 2025

Littérature mauricienne : Un article de Sedley ASSONNE sur l'EXPOSITION consacrée par le BLUE PENNY MUSEUM (Maurice) à l'immortel Malcolm de CHAZAL.

 




EXPOSITION AU BLUE PENNY
MUSEUM
MALCOLM DE CHAZAL : LA BONTE CIVILISE.







Le 12 septembre 2021, nous consacrions un texte à Malcolm de Chazal. Cette semaine, Emmanuel Richon présentera l’exposition des œuvres du grand artiste, au Musée Blue Penny. L’occasion de relire ce que nous avions écrit. Pour mieux comprendre ce qu’était l’auteur de Sens Plastique :
La bonté civilise, écrivait Malcolm de Chazal dans Sens plastique. Né le 12 septembre 1902, à Vacoas, l’ancien ingénieur sucrier, puis employé des Télécoms, est le génie littéraire de notre île.
Et d’ailleurs, sans compte Facebook et LinkedIn, n’étant même pas sur Twitter ou Instagram, il reste toujours présent sur le front de notre actualité. Preuve que le temps reste le plus grand critique.
Comme André Breton, le Pape du Surréalisme, l’écrivait (Je n’hésite pas à voir le plus grand évènement de nos jours dans la publication de l’œuvre de Malcolm de Chazal)., Malcolm est un prodige en lui-même. Refusant la gloire littéraire à Paris, alors que ses compatriotes y verront un moyen de briller ailleurs, Chazal préfère prospecter la beauté de son île. Lui donnant un imaginaire unique, en immortalisant notamment les montagnes dans Petrusmok, leur donnant un caractère mythique, et ensuite en travaillant sur la langue. Forgeant des aphorismes qui tiennent encore la route de nos jours.
Il célébrait la langue créole (prenez acte, ceux qui en disent du mal), et tout swedenborgien qu’il était, passait ses journées à l’hôtel National, à la rue Pope Hennessy. On le voyait dans Port-Louis, son chapeau feutre de couleur noire sur la tête, dans un costume du même ton, et sa tente de vacoas dans une main. Ainsi était le plus grand écrivain né sur cette île, qualifié de « fou » de son vivant.
Pourtant, les fleurs le regardaient vivre, et lui parlaient. Et les montagnes lui montraient les têtes de nègre cachées dans leur pierre. Tel Baudelaire, il mettait à jour le symbolisme de son île, et s’évertuait à lui dresser une cartographie empruntée à un mystique Réunionnais, Jules Hermann.
Militant pour l’indépendance, proche du Parti Travailliste, qu’aurait-il écrit sur ce qui se passe actuellement dans notre île ? La bonté civilise, disait-il. Et il aurait sûrement souhaité meilleure santé à Navin Ramgoolam, même s’il n’aurait pas reconnu le parti de son passé. En dialogue avec son ami Marcel Cabon, Malcolm de Chazal, comme une pierre venue d’une autre planète, disait Jean Paulhan, était trop en avance sur son temps. D’où sa solitude, et l’incompréhension de ses contemporains.
Evidemment, l’auteur ne cherche pas à nous être agréable. Il ne cherche pas non plus à faire beau, ni même gracieux. Au fait, il ne cherche pas du tout. Plutôt, il sait quelque chose, qu’il est forcé de nous dire. Il est gonflé de quelque chose (comme une voile par le vent) qu’il lui faut tout de même rejeter. Que les mots y aillent comme ils peuvent ! Mais leur maladresse, la gaucherie de leur emboîtage, leurs contrastes, tant d’agitations et de battues, parfois un sens pris à revers (plutôt qu’à rebours), leur appel constant à la sensation brute nous sont plus nourrissants que ne serait leur grâce ou leur légèreté, l’idée monte comme une crème qu’on bat.
Que disait-il de son œuvre ? Ceci :
Quoique j’aie tout puisé en moi-même pour créer ma cosmogonie, je nie l’intelligence en tant que faculté-le cerveau n’étant pour moi qu’un vase où s’engouffre l’intelligence universelle…Mon œuvre est sur un tel haut plan qu’il ne faut pas seulement la surplomber, mais infiniment plus.
Extraits de ses aphorismes :
1 : L’idéaliste a la marche des orteils ; et le matérialiste a la marche des talons.
2 : Le rouge est l’universelle charnière des couleurs. S’il fallait mettre le soleil en rosace, le rouge en serait le moyeu.
3 : Maternité répétée ovalise la hanche des femmes, comme celle de l’arbre qui a longtemps porté des fruits.
4 : Nuages bas servent de presse-papier au vent.
5 : L’ouïe est un spectateur qui applaudit des yeux.
6 : Le cœur, chez les femmes, est un sexe au ralenti, et leur sexe un cœur qui bat à plein.
7 : Les snobs toussent du nez.
8 : Les vallées sont le soutien-gorge du vent.
9 : Le soleil est un blanchisseur à sec.
10 : L’oiseau est le seul être vivant dont la voix change de timbre avec le ton.








Sedley ASSONNE.



























































Source ; Sedley ASSONNE.








































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