On quitte l’autoroute et, par l’étroit chemin dont les platanes des
bas-côtés dressent une sorte de nef bruissante, ombreuse et fraîche, on entre
tout à coup dans une zone qui, semblant préservée de l’altération des jours,
procure une sensation de bien-être serein peu ou prou diffusée en rendant plus
poreux. On se trouve au cœur du pays des étangs – l’un plus spacieux, nacré
comme l’intérieur d’une huître par un ciel de lait
entre ses rives limoneuses festonnées d’herbes inondées. Certains mois, sa lisère
est remplie d’oiseaux : mouettes rieuses,
hirondelles de mer, tadornes, hérons par couples, râles, poules d’eau nichant
parmi les roselières, quelques-uns à l’affût sur des pieux que l’on dirait
fichés à leur intention. Il arrive qu’une garzette prenne son vol d’un plan
d’eau pour en rejoindre un autre. Serait-ce à elle que l’on doit comme un
enchantement, à elle qui, nouant sa blancheur au soir, affermit, accomplit –
mais quoi, précisément ? – par son essor, son avancée tendue, sa simple netteté
sur le fond sombre des grands pins ? Un éclaboussement de poisson qui bondit,
quelques piaulements encore, l’ombre montante est tout aussi inexorable que les
astres.
François LAUR
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire