La “classe journalistique”.
Hier, Israël a largué une bombe sur l’enclave Palestinienne. J’ai scrollé tout Yahoo pour voir ne serait-ce qu’une brève sur ce massacre. Mais rien ! Pourtant, les images montraient des Palestiniens morts qui voltigeaient dans les airs, preuve de l’impact de ce bombardement sur ce peuple en voie de disparition. Mais les médias occidentaux préféraient parler du quotidien de leurs pays respectifs, du voyage de Netanhyahou en Hongrie, des déboires de Marine Le Pen et des tarifs de Donald Trump. Mais de massacre des Palestiniens, point ! Mais il n’y a pas que les média occidentaux. A Maurice également, c’est la même indifférence envers ce génocide qui se déroule pratiquement à ciel ouvert, même si l’armée Israélienne fait tout pour cacher ses crimes aux yeux du monde. Sans pour autant se soucier de l’opinion publique, et encore moins des Nations Unies !
Comment expliquer que les journalistes locaux, dont les plus jeunes se pensent déjà « arrivés », sans pour autant savoir faire un texte, mais juste parce qu’ils savent mettre un micro devant le nez d’une personne, soient autant déconnectés de ce qui se passe autour d’eux ? En fait, si Israël et les Etats-Unis peuvent autant masquer leurs crimes, c’est aussi dû à des années « d’achat » des consciences de beaucoup de journalistes, tant locaux qu’étrangers, à travers l’USAID et les programmes d’embrigadement déguisés en programme « culturel ». Beaucoup de journalistes, d’universitaires et d’auteurs locaux ont ainsi profité de ces programmes. Et il va de soi qu’ils restent silencieux devant le massacre des Palestiniens, dans l’espoir de mettre encore une fois les pieds dans l’Ohio !
Et il est choquant de lire, dans L’Express du samedi 5 Avril, dans l’entretien qu’accorde Bruno Cunniah, le futur ambassadeur Mauricien à Madagascar, qu’il apprend la langue malgache grâce aux cours en ligne gratuits de l’US Peace Corps !
Peut-on encore faire se côtoyer US et Peace dans une même phrase de nos jours, sachant que les Etats-Unis comptent 225 ans de guerre dans l’histoire de leur pays ? Et qu’ils arment lourdement Israël en connaissance de cause pour exterminer le peuple Palestinien ? Il est en fait plus facile de « s’émouvoir » pour l’auteur Boualem Sansal que de plaider la cause Palestinienne. Et c’est triste de voir un Tahar Ben Jelloun soutenir qu’il ne peut pas parler de la Palestine parce qu’en France, c’est lié au terrorisme. Laissant ainsi les Palestiniens à cette réclusion solitaire qu’il dénonçait fort justement dans ses livres.
Même un Jean-Marie Le Clézio ne veut pas défendre les Palestiniens. Il écrivait pourtant ceci, dans Le procès-verbal, Prix Renaudot à sa sortie, en 1963 : Il y a une sorte de Dieu qui habite chacun d'eux tour à tour, et qui les appelle à Lui, à l'heure qu'Il a choisie, pour les faire vivre en ce qu'ils n'ont jamais été jusqu'alors, des hommes morts. A croire qu’il a oublié ses propres écrits, et surtout qu’il se doit de donner l’exemple et de faire comprendre au monde que la paix est possible, et qu’il ne sert à rien de larguer des bombes sur des innocents.
Tout cela me ramène au Media Trust. J’ai siégé au sein de cet organisme, chargé de "perfectionner" le journalisme à Maurice. On nous disait qu’il fallait l’aide des journalistes étrangers pour que nous puissions mieux écrire sur l’actualité de NOTRE pays. Et parmi ces grands
« experts » de la plume, il y avait Robert Ménard. Ce co-fondateur de Reporters Sans Frontières devait pourtant se rapprocher du Front National, et aujourd’hui il n’est plus qu’un avatar de ce monsieur qui parlait journalisme à ses confrères Mauriciens. Et je ne cite pas Patrick Poivre d’Arvor, longtemps présenté comme le « roi de l’audimat » en France, et qui a pitoyablement disparu des médias, pour faits de viols et d’agressions sexuelles !
Voilà les exemples que nous devions "admirer". Et Dieu merci, jamais je n’ai été en extase devant les écrits de ces deux messieurs ! Cette année, le nouveau gouvernement a décoré deux journalistes: Jean-Max Baya et Bernard Saminaden. En guise de remerciement, l’ancien journaliste de L’Express dédiait cette décoration à la classe journalistique. Si on sait tous qu’il n’y a jamais eu de cohésion au sein de la presse, notamment pour la mise sur pied d’un syndicat pour les journalistes, mais aussi pour s’entendre sur les grands sujets à défendre, nous ne savons donc pas à quoi Bernard Saminaden faisait allusion. Tellement le monde des médias à Maurice donne dans le dispersé et l’éparpillement !
Mais en tout cas, il y a de quoi avoir honte d’être journaliste de nos jours. Surtout quand on voit cette classe journalistique se taire quand une telle information a de quoi glacer le sang : Selon un nouveau rapport, plus de journalistes et de professionnels des médias ont été tués dans la bande de Gaza assiégée depuis octobre 2023, date à laquelle Israël a lancé sa guerre génocidaire en cours, que pendant les deux guerres mondiales et d’autres grandes guerres réunies.
Oui, Israël a tué plus de 150 journalistes, rien qu’à Gaza, et quand on sait que dans une salle de rédaction à Maurice il n’y a pas plus d’une vingtaine de journalistes, cette hécatombe ne peut signifier qu’une chose : Israël tue toute personne qui brandit une carte, une veste, une caméra ou un drone pour faire son travail au nom de la presse. Comment la classe journalistique, tant locale qu’étrangère, peut-elle encore se taire devant de tels crimes contre ceux qui défendent le droit à l’information ? Honte à nous !
Sedley ASSONNE.
Source : Sedley ASSONNE.