Une préface de l’excellent poète belge Arnaud DELCORTE, un texte
de quatrième de couverture de la non moins talentueuse poète réunionnaise
Catherine BOUDET : ce recueil est tout ce qu’il y a de bien
« encadré ».
Publié par une maison d’édition haïtienne, il compte 63 pages de
textes en vers libres, courts ou bien relativement courts (ne dépassant jamais
une page).
Son auteur est un poète encore très jeune.
Chez lui, pas de grandiloquence ni d’effusions baroques, mais
une sorte de lyrisme que je qualifierais, presque, de « feutré », en
tout cas de dompté, de fluide.
Un ton grave qui, pour exprimer le tragique, opte pour la
pudeur, si ce n’est pour une espèce de nudité, de sanglot retenu qui a quelque
chose de poignant et de digne.
Des mots, certes, durs à entendre (évocateurs de morcellement,
de mutilation, de catastrophe ;
des mots tels que déchirure, Blessure, misères, dérive, larmes, saignement, cendres, marâtre, Déchus, douleur, crucifiées, démence, linceul, angoisses) et cependant, l’on en retire
nulle impression de brutalité. Le style n’est nullement violent, comme il
serait pourtant en droit de l’être. Car tout le drame haïtien est là.
Omniprésent. Incontournable. Avec tout ce qu’il implique de traumatisme, de nuit, de mer et, bien sûr, de carnassier soleil.
Sans oublier le deuil, qui traine,
tel un fantôme, derrière ces mots et ces vers, lesquels possèdent, sans l’ombre
d’un doute, une dimension « hantée ». Avec tout ce qu’il implique,
aussi, de sentiment d’impuissance (Quel
monde enfanteras-tu / Quand nous
sommes les chiens / De misères).
Pour J.W CHARLES, la blessure est encore bien saignante, à vif.
Les drames qui ont marqué le douloureux passé de son pays et qui continuent
d’imprégner son tragique présent impliquent l’exil, l’évasion de la prison
îlienne qu’enserre la mer, cette
« créature » par ailleurs si ambiguë.
L’îlien – et, à plus forte raison, le damné d’Haïti - se trouve forcément,
naturellement A la croisée des chemins ;
ce d’autant plus qu’il est poète.
Il y a, dans ces textes, des accents qui me font un peu penser à
l’œuvre du grand poète mauricien Edouard MAUNICK.
Où chercher ? Où
pouvoir se trouver ? Que faire, lorsque le renoncement à la terre
des origines (sensuellement et viscéralement aimée) devient condition sine qua
non d’une possible renaissance ?
Ne sommes-nous pas tous, nous, îliens, à jamais habités par doubles et errances ?
L’île ne nous poursuit-elle pas d’autant plus, ne s’ancre-t-elle
pas d’autant plus profondément en nous que nous cherchons à nous en éloigner,
pour s’en aller A la cueillette des
étoiles ?
P. Laranco.
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