Si les lois de la physique sont les mêmes dans
tout l’univers et si les mathématiques ont, en partie, le pouvoir de nous
faire comprendre sa structure, cela pourrait bien, en effet (entre autres
phénomènes) aller dans le sens de l’hypothèse que celui-ci serait une sorte de
« simulation informatique
géante et extrêmement complexe, ainsi que certains scientifiques l’ont
émis.
La présence de
lois, d’information (stockée à la surface des trous noirs ou à l’intérieur de
la molécule d’ADN) est tout de même très troublante.
Les Hommes ont la terreur de la mort parce que leur moi leur
joue des tours.
Quand ils/elles sont jeunes, certes, on peut attribuer cette
crainte suprême à un instinct de conservation qui serait, pour la plus grande
part, programmé par la nature (la nécessité, la « mission » de
séduire un(e) partenaire, de se reproduire et d’élever sa progéniture, ce qui demande,
chez l’espèce humaine, de longues années).
Mais passée cette période de leur vie ?
Il y a gros à parier, je pense, que ce ne sont –et ce ne sont
que-la conscience individuée, l’ego à l’état pur et l’attachement aux
sensations agréables que procure la vie, de même que l’impossibilité de
s’imaginer disparu (de conceptualiser la mort et l’état de non-existence) qui
contribuent au gigantesque cabrement de l’être humain devant l’échéance
inéluctable.
La philosophie
devrait, sans cesse, tourner autour de l’incertitude et se limiter à cela.
Le doute est plus important que la certitude, et la question,
plus importante que la « réponse » (si tant est que celle-ci existe).
Peut-être la
« raison d’être » de l’Homme, du cerveau humain n’est-elle pas de
trouver des réponses, mais d’en chercher, jusqu’à ce que son temps, en tant
qu’espèce, se termine.
Ne trouvons-nous pas la vie « belle » parce que nous
n’avons pas d’autre choix ?
Parce qu’en somme, nous sommes bien obligés de la
supporter ?
Le philosophe
Ludwig WITTGENSTEIN réfléchissait tant à la logique qu’il en frôlait la folie
(de son propre aveu).
Il faut partir du principe que tu ne sais pas. Que tu as les
mains pleines de questions, mais entièrement vides de réponses. Que la
complexité du monde t’interdit toute affirmation péremptoire, de même que toute
prétention à la connaissance complète. Que le peu que tu peux
« savoir » a trait à de simples fragments, de simples parties d’un
tout qui, lui-même, ne sera jamais égal à la somme de tous ses composants.
Un(e)
philosophe, cela ne devrait pas proposer de théorie.
Cela
réfléchit. Donc, cela évolue de façon permanente.
C’est une
pensée mouvante, dynamique qui, sans relâche, doit se remettre en cause. Le
dogme n’a pas de place en elle.
Prodiguer des conseils aux gens, cela doit se faire avec
beaucoup de tact. Y compris quand ceux-ci le demandent. C’est un exercice de
haute voltige. Car la tentation mimétique si typique de l’être humain nous
encombre toujours plus ou moins de la tendance à nous mettre à la place de la
personne que nous entreprenons de conseiller (« Si j’étais toi, je ferais
ci… ») et à nous « approprier » une expérience qui n’est en
aucun cas la nôtre. Il est difficile de penser, de ressentir et de réagir
« à la place de » quelqu'un sans, quelque part, tenter de se
substituer à lui et d’imposer votre propre point de vue. L’autre a alors
l’impression qu’on le dépouille de sa propre volonté, qu’on « prend les choses
en main » à sa place et cela l’infériorise. Le rejet des conseils et la
réaction vexée du conseilleur qui s’ensuit souvent ont toujours plus ou moins
ce genre de phénomène pour origine.
A la limite, je dirais que personne n’est en mesure de conseiller
qui que ce soit, du moins autrement que d’une manière très partielle.
Si l’on a peur
de mourir, c’est qu’on est trop attaché à sa conscience d’être.
Regarder n’est pas voir.
Chaque théorie
philosophique est le reflet des « obsessions » -ou, du moins, des
préoccupations – personnelles du philosophe qui l’a élaborée. Les philosophes
CHOISISSENT les notions, les concepts sur lesquels ils réfléchissent (à leur
manière) et en font le point de départ, le nœud central d’une théorie.
Pour FREUD, ce
furent le sexe et l’inconscient, pour NIETZSCHE, l’antichristianisme et le
vouloir-vivre « naturel », brut, pour MARX, l’exploitation de l’Homme
par l’Homme, pour JÉSUS, l’agapè, pour les penseurs des Lumières, la Raison,
pour BOUDDHA, la compassion, pour l’hindouisme, l’illusion du monde et l’unité
dans la diversité, pour DESCARTES, la pensée, pour SARTRE, l’absurdité de la
vie, pour BEAUVOIR, la condition féminine, pour GANDHI, la non-violence, pour
CONFUCIUS, l’harmonie, l’ordre (notamment social)- et j’en passe…
Ludwig WITTGENSTEIN était un « obsessionnel » de la
philosophie.
On pourrait se demander pourquoi.
Philosopher était peut-être pour lui l’unique façon de
s’accrocher à l’existence ; le seul « fil » (ténu) qui le
reliait peu ou prou à la vie, à un monde où il ne se trouvait pas vraiment de
place solide, légitime. Sa nature (fort particulière) de génie
maniaco-dépressif et un peu autiste n’explique pas tout.
Je le soupçonne fort d’avoir été un enfant non-désiré.
(Réflexion inspirée par l’excellent ouvrage de Ray MONK : WITTGENSTEIN, 1993, Flammarion –
Collection « Grandes biographies »)
Dans plus de
cas qu’on ne le croit, les femmes ne ménagent pas les hommes parce que ceux-ci
les impressionnent par on ne sait quelle « essence supérieure » dont
ils seraient dotés.
Elles les
ménagent parce qu’elles craignent leur extrême violence toujours dormante et
parce qu’ils possèdent LE POUVOIR et contrôlent la culture. En somme, bien plus
par résignation et par intérêt que par admiration et/ou amour.
Elles
détestent prendre des risques.
Nous ne faisons jamais qu’interpréter les réactions et
comportements de nos semblables.
Tout ce que
nous pouvons écrire a un parfum d’inachevé, une dimension d’incomplétude –
parfois juste très subtile en ce qui concerne les plus éclatantes réussites.
Chaque âge de notre vie est l’ébauche, l’esquisse de l’étape qui
le suivra. Tous, à chaque « palier » de notre existence, sommes à
l’état de chrysalide avide d’une plus grande complétude.
Quant à savoir si nous en sommes conscients, c’est une toute
autre affaire.
On dit
souvent : «cela (ou il/elle) a au moins le mérite d’exister» ;
mais se demande-t-on jamais si exister serait un mérite – et en vertu de quoi ?
La misère, la pauvreté sont les pires avilisseurs de l’être
humain. Elles fabriquent des êtres fascinés par l’argent et par le pourvoir,
qui ne respectent que ceux-ci. Elles les rendent prêts à la prostitution, tant
celle du corps que celle de l’âme. Elles les transforment en vers de terre, en
mendiants au ras du sol. Ou, pire encore, en âpres calculateurs dénués de
sentiments, en menteurs, en escrocs, si ce n’est en psychopathes. Elles
émoussent les sentiments et tout ce qu’il y a de noble en l’Homme. Elles
endurcissent le cœur sous l’effet de la colère et de l’envie. Elles atrophient
le sens moral, et la dignité personnelle. Parce que « nécessité fait
loi ».
Le pire, peut-être, dans le manque de ressources matérielles,
c’est qu’il déshumanise.
Il arrive que
l’absurdité qui imprègne le monde me saute à ce point aux yeux qu’elle soulève
en moi non des soubresauts de nausée, mais des vagues incontrôlables de fou
rire.
Malheur aux pays qui s’imaginent être le centre du monde !
Ils risquent de tomber de haut.
La Chine (aux XIXe et XXe siècles) en a fait l’amère expérience.
La France aussi (depuis le cataclysme de la Seconde guerre mondiale).
Trop d’orgueil nuit à l’influence des civilisations.
WITTGENSTEIN ne
faisait guère confiance aux mathématiques. Il y voyait une convention, à peu
près analogue au langage. Il leur déniait le caractère « universel »
que les scientifiques leur attribuent.
L’Homme est tribal. Et rares sont ceux qui, spontanément,
considèrent l’humanité dans son entier comme leur tribu.
Sept milliards (et quelques) d’êtres humains, c’est beaucoup…sans
compter les barrières que constituent les langues, les mœurs et le bon vieil
esprit territorial.
Comme l’ont décelé les tests des psychologues, le cerveau humain
a des limites : il ne peut pas nouer des liens avec plus de 100 à 150
autres personnes (au grand maximum).
L’intimité, donc la confiance, ne s’établit qu’avec des proches
qui, au fond, ne font que « prolonger » le cercle familial, référence
suprême. Le reste de l’humanité se trouve, dans le meilleur des cas, ignoré et,
dans le pire, il prête le flanc à une méfiance « instinctive »,
laquelle est source potentielle d’affrontements.
C’est pourquoi, ne m’en veuillez pas, mais j’ai tendance à être
sceptique quant aux capacités de notre espèce à se convertir à « l’amour
universel » et à s’y adonner. Pour cela, il faudrait d’abord parvenir à s’extraire
de la mesquinerie que représentent l’égotisme et son corollaire immédiat, son
prolongement : le tribalisme. La propension de l’Homme à créer des clans,
des « sectes » (qui ne sont rien d'autre que des familles élargies) s’avère innée.
Dans cette optique, je pense que le métissage universel ne
résoudra en rien le problème que posent les tendances foncièrement tribalistes
du primate humain. J’ai bien peur, hélas, que l’Homme, tant qu’il demeurera ce
qu’il est, suscitera la formation de clans, de camps qui s’opposeront à d’autres,
sous n’importe quel prétexte.
P. Laranco.
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