Qu’est-ce que cette course cache ? Qu’y a-t-il derrière la frénésie, celle du paraître, celle du désir du désir de l’autre, derrière la monomanie de la possession de la matière ? L’être n’est plus en soi, il ne peut accepter sa solitude, il ne peut la contempler, il est à l’extérieur de soi, dans un rapport désemparé à cette présence qui est au bout du compte toujours absence. L’euphorie succédera à une autre puis à une autre, après il y a chute, la précarité d’un corps dont le sens appartient au temps et la pesanteur de la conscience. L’être est, dans un certain sens, un drogué, il puise cet opiacé dans les veines de la réussite, de l’argent, du pouvoir, du regard des autres, il ne peut jamais s’en satisfaire, il lui faut toujours plus mais plus l’extase est violente, plus son autre versant est douloureux. Parfois il lui arrive de s’arrêter. Il prend le temps de souffler. Il renoue avec le silence. Il chemine vers la paix. Mais jamais très longtemps. La séduction du monde est irrésistible. Il ne cesse de l’interpeller, ne cesse de l’inciter à la débauche de soi. Les belles images se succèdent, jamais l’image n’a autant régné, on lui assène constamment les mythologies contemporaines, des religions qui n’en sont pas et il s’abandonne de nouveau au cycle de ses enfers. Les plus fragiles cèdent parfois à la démesure, ils s’affranchissent de la morale, devenus les pantins consentants des apparences. Ainsi cet être est tendu perpétuellement vers la conquête et la possession du monde, son corps tout entier en est l’instrument et le vouloir, l’être est aveugle mais cet aveuglement est la fabrique du réel. Il ne voit pas mais il croit voir. Son cœur est revêtu d’un voile. Au bout du destin de l’être, la mort, son anéantissement. Est-ce qu’il y pense ? Parfois. Mais il préfère l’ignorer ou il feint de l’ignorer. Il ne peut savoir que sa démarche et sa folie s’inscrivent dans un rapport à la mort, que la volonté de monde est la tentative d’oublier ce même monde. Il récuse, quand cela survient, les instances de la lucidité. Car la course est lancée, l’être chemine vers le mur de ses fatalités, lors du rituel d’une euphorie qui énonce son vide.
Umar TIMOL.
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