La Vérité, ça
fâche. Ça pique.
C’est hérissé d’épines,
comme l’oursin et le cactus. Il faut la contourner, la taire.
(Se) la dire
(autant que faire se peut pour l’Homme), c’est prendre un risque conséquent,
qui bien souvent, nous effarouche.
Si bien des choses
sont (ou sont réputées être) « le propre de l’Homme », le goût
foncier, sincère du vrai et de son étalage n’en fait guère, je crois, partie.
L’orgueil et le
sens exacerbé du jeu social y font par trop obstacle.
Les
gens qui s’imaginent que le « métissage universel » résoudra les problèmes
de l’humanité et la « sauvera » se montrent, me semble-t-il, assez
naïfs.
Moi
aussi, longtemps, j’y ai cru. Puis je me suis penchée sur pas mal de sociétés à
vocation multiraciale et multiculturelle, parmi lesquelles celle dont je suis,
en grande partie, originaire. Cela m’a permis de comprendre qu’à problème
complexe, aucune « solution » simple, simpliste ne s’applique.
Regardez
les Etats-Unis, Haïti, et même le Brésil ou Madagascar…
Est-ce
que le fait que, par exemple, l’ancienne Egypte était le produit d’un des plus
vieux métissages de l’Histoire l’a empêchée d’une quelconque façon de se
comporter en nation à l’identité forte, affirmée, voire agressive et
conquérante, dotée d’un complexe de supériorité plus que certain ? Est-ce
que les nombreux métissages qui ont irrigué le monde arabe empêchent qu’actuellement
encore, le Noir y soit regardé, souvent, avec un indéniable mépris ? Est-ce
que le métissage (lui aussi très ancien) qui a présidé à la formation de l’Inde
(ou des Indes) a pu contrecarrer l’emprise herculéenne du système de castes
(dans lequel la couleur de peau joue également, semble-t-il, un rôle assez
marqué) ?
Le
contact entre groupes ethniques, entre cultures humaines différentes (par l’aspect
physique et/ou par le mode de vie) ne va jamais sans tensions, car l’Homme est
un être tribal, conçu pour vivre en groupes restreints. Métissez le monde
entier et, à mon sens, il y a gros à parier qu’il se formera de nouvelles « tribus »,
de nouveaux agrégats, cimentés en premier lieu par les liens intimes, les
façons de communiquer et la vie commune (le « destin commun »). « Eux
et nous », selon la formule consacrée (aussi haïssable soit-elle).
Regardez,
maintenant, ne serait-ce que les cours de récréation et les bandes (ou gangs)
spontanés de jeunes…
Et
pourquoi la « fièvre du foot », lequel cristallise l’opposition
(certes, sous une forme canalisée et atténuée) de deux équipes ?
Tout le monde a « droit
au bonheur » (illimité de préférence), et, de surcroit, chacun trimballe
son « bardât » de problèmes.
Du coup, l’on n’a jamais
vu autant de gens privés de solidarité et de chaleur humaine, isolés et donc
encore plus enferrés dans leur pelote de problèmes, et par conséquent…malheureux.
Nous
nous battons tous (entre nous) pour une Vérité en confettis, en parcelles. Pour
des confettis, des (micro)parcelles de la Vérité, qui ressemblent à du persil
haché menu.
Quoiqu’on en pense
(quoiqu’on VEUILLE en penser), c’est le passé (ou plutôt la « chaîne des
passés ») qui fabrique le présent. C’est l’Histoire (connue ou non) qui a
le pas sur toutes les volontés, sur tous les mythes.
« Se
faire respecter »…voilà une expression qui en dit singulièrement long.
On
ne devrait jamais avoir à l’employer, à ce qu’il me semble.
Si
l’Homme était vraiment humain, vraiment réalisé pleinement, le respect n’irait-il
pas de soi ?
L’écrivain (qu’il
soit poète ou prosateur) a une double vie. Celle qu’il/elle vit de façon
commune, semblable à celle de tout un chacun. Et celle qui se déroule dans sa
tête et qui, si souvent, cherche à avoir le dessus sur la première.
On peut dire qu’il/elle
est partagé(e), voire tiraillé(e) entre deux « dimensions »
distinctes.
Et, forcément, son
effort pour créer d’autres mondes lui « bouffe du temps », et empiète
sur sa capacité à pleinement « vivre sa vie ». En un sens, tout
écrivain (ou « écrivant »)
passe peu ou prou à côté de sa propre existence.
Un
grand esprit et un esprit mesquin ne sont absolument pas incompatibles. Ils
peuvent parfaitement cohabiter dans un seul et même corps, dans une seule et même
cervelle. L’Homme est compliqué de nature. C’est comme il le peut qu’il s’accommode
de ses propres contradictions – y compris les plus improbables, les plus
malaisément gérables. Je trouve passablement amusant le fait de savoir que la
logique est, en fait, l’ « invention » d’un organe composite,
bourré de « compartiments », d’ « étages » et de
connexions neurales aussi plastiques que
capricieuses. Certaines parties du cerveau sont obsédées par la cohérence,
submergées par leur volonté, par leur besoin de « trouver du sens »,
de la netteté. Ne seraient-elles pas mieux inspirées si elles mesuraient
davantage combien l’ensemble dont elles
font partie est, par bien des côtés, un assemblage hétéroclite ?
La Vie. Résistante
et fragile. Stimulée par sa propre mort.
Créative.
Ingénieuse. Invasive. Dynamique. Tenace et acharnée.
Mortelle, oui, mais
vouée, dans son entier, au contournement, à la mise en échec de l’entropie.
Pourquoi la Vie se complexifie-t-elle sans cesse, s’adapte-t-elle sans cesse,
si ce n’est pour cette raison ?
L’aspiration de la
Vie pourrait bien être l’immortalité (relative).
La Vie a mis de son
côté un maximum de solutions (qui n’étaient autres que des « réponses »),
pour se donner la chance de survivre.
L’intelligence
humaine et la robustesse des extrêmophiles (aussi remarquables l’une que l’autre)
en sont de fameux exemples.
Peut-être la Vie
mériterait-elle davantage qu’on l’appelle « Survie » plutôt que « Vie »,
en définitive.
Je pense qu’elle
continuera à trouver des solutions et des parades. Quoiqu’il advienne. Car elle
est, bien sûr, loin d’avoir épuisé tous ses potentiels.
C’est l’espèce
humaine qui est incluse dans la Vie, et non le contraire. Evidemment, avec le
côté lui aussi invasif de notre présence et de notre « intelligence »
étonnante mais quelque peu mégalomaniaque, avec les dommages qu’il cause en ce
moment même, nous l’oublions un peu.
L’illusion
est toujours tentante.
Il
faut savoir y résister (dans la mesure du possible, compte tenu de notre
nature). Soit parce qu’elle est susceptible de vous exposer au franc ridicule,
soit encore, entre autre, parce qu’elle vous laisse les mains nues une fois
évanouie.
Plus
elle a été tenace et conséquente, plus le deuil peut en être cuisant.
Quel est le rapport
entre le Temps et la dégradation des choses ? Le Temps existe-t-il parce
que les choses sont en état de changement perpétuel, parce que l’univers (au
sens cosmologique du terme) est pris dans un vaste mouvement dynamique (EST un
vaste mouvement dynamique) – ou bien est-ce plutôt le contraire ?
Pour
nombre de gens, les territoires de l’amitié ou de l’amour s’arrêtent là où
commence celui de leur egomanie.
En général, ce ne
sont pas les femmes qui accrochent le regard des hommes. Ce sont bien plutôt les poupées de
chair, plus ou moins interchangeables.
En avez-vous déjà
vus beaucoup qui se retournent dans la rue (à la vitesse de l’éclair) sur une
obèse, une mal fagotée, une ridée à cheveux gris, une qui tire un peu trop la
tronche ou une un peu trop « androgyne » ? Ou encore une qui
porte le voile ?
Examinez la « panoplie »
de la séduction féminine officielle, homologuée et vous n’aurez pas le moindre mal
à constater combien elle est rigide, stéréotypée à l’extrême, et combien,
partant, le désir masculin est prévisible, répétitif.
Je
me méfie de l’attachement. Comme de toutes les choses qui accaparent.
Comme
de toutes les choses qui vous exposent à la sensation de manque, de perte, de
dépendance.
P.
Laranco.
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