Nouveau roman de Sita Seecharrun Harris The guardians of Le Morne : Pour ouvrir les yeux sur l’irréel.
Il y a une constante qui revient à chaque fois dans les romans de Sita Seecharrun Harris. A savoir que ses personnages sont toujours aux prises avec la réalité, et qu’on pourrait appeler « l’irréalité ». L’auteure choisit cette même thématique dans The Guardians of Le Morne. Et s’attarde sur un aspect qui n’a pas souvent été pris en compte dans les romans évoquant la période de l’esclavage dans notre île.
S’il est bien que l’auteure imprègne son histoire de ce pan capital de l’histoire des esclaves et des marrons, qui avaient, rappelons-le, une histoire, une culture, Sita Seecharrun Harris tombe cependant dans le piège de tous ceux qui ont écrit sur Le Morne, et vient redire que ce sont les Britanniques qui étaient venus annoncer aux marrons réfugiés sur la montagne qu’ils étaient libres. Or, comme nous l’avons en maintes fois précisé, Bernardin de Saint Pierre en personne en parle dans Voyage à l’Isle de France. Pour dire que cela se passait durant la période française, et non Britannique « according to local tradition », en 1833 !
Cela dit, le sujet pris par l’auteure est intéressant à plus d’un titre. Puisque cette valse entre réalité et
« irréalité » lui permet de s’engager dans une dénonciation des conditions de vie des esclaves, et de ce qui se passe pour leurs descendants de nos jours: I do hope that while reading this piece of imagined realties and fantasy mixed together, a voice can be heard and felt by the reader. It is my way of expressing and reminding us of a past many want to put behind and toss to the winds.
I do hope that while reading this piece of imagined realties and fantasy mixed together, a voice can be heard and felt by the reader. It is my way of expressing and reminding us of a past many want to put behind and toss to the winds.
C’est en cela que ce ton humaniste donne tout son relief au livre. Et nous fait entrer dans le village de Kipengu, niché entre mer et montagne, où vit Zuri. C’est lui qui devient « l’écouteur », celui qui a le don d’entendre ce que les vagues racontent. Car il porte la marque des Liminal, the ones who stood between, the bridge between the seen and the unseen, the earth and the abyss, the mortal and the eternal.
Sita Seecharrun poursuit dans sa quête de l’indicible en rappelant que l’homme ne peut se détacher des éléments. Et que plus les deux sont en symbiose, plus l’humain peut se rapprocher de l’étatdivin. Et de Grand-Mère l’océan. Mais le danger guette : The barons, wealthy sugar estates’ landowners who had moved to the island in recent years, had begun buying up more properties, forcing the farmers and fishermen out of their ancestral land.
L’auteure prend, avec ces mots, partie pour les faibles. Et ne donne pas dans la demi-mesure quand il s’agit de jouer avec les traditions.
Son plaidoyer pour les baleines et les dauphins, l’arrivée d’une sirène, frayent avec l’irréel, et il faut avoir l’esprit « connecté », ou simplement écologique, pour croire à une telle approche. Et c’est bien qu’il en soit ainsi.
Le livre résonne comme un véritable cri du cœur pour toute cette côte ouest, allant de La Prairie au Morne, en passant par Macondé. The guardians of Le Morne devient alors un écho de cette mort lente qui s’insinue dans les mangroves, les veines vertes du littoral. Auteure de When the Stars Shine, Taming of the Brew, The Curse of Bêti et The Lost World of Mû, et de livres-jeunesse, Sita Seecharrun, mauricienne établie en Angleterre, n’oublie donc pas son île et ses turpitudes. The guardians of Le Morne prolonge sa réflexion sur le devenir d’un pays. Qui a le choix entre se laisser bétonner et laisser détruire tout ce qui faisait son authenticité, ou se ressaisir et sauver ses traditions culturelles, de toutes communautés, puisqu’étant un pays de peuplement. Les racines africaines et créoles de cette île méritent donc sauvegarde et reconnaissance. L’auteure a le mérite de ne pas tomber dans les clichés en parlant des Créoles/descendants d’esclaves et marrons. C’est ce qui fait la force de ce roman. Qui porte un regard extérieur sur une facette de notre peuple.
Malcolm de Chazal disait que des géants avaient sculpté les montagnes de cette île. Mais Le Morne porte toujours en elle, dans ses flancs, le battement du cœur des marrons !
A noter que la version française du roman est aussi disponible, sous le titre Les gardiens du Morne .
Sedley ASSONNE.
Source : Sedley ASSONNE.
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