lundi 15 août 2016

TERRORISME. "POURQUOI ILS NE NOUS AIMENT PAS ?"


En France, la guerre d'Algérie est toujours une sale plaie purulente, suppurante.
Elle fut un drame, en tant que guerre acharnée, et ensuite, dans l'esprit des colons chrétiens dont les aïeux furent installés, par la force des armes, dans l'ancienne "colonie de peuplement" au XIXe siècle, sa conclusion fut vécue comme une "dépossession" impardonnable, laquelle alimenta un venimeux et durable ressentiment.
On parle de "haine", mais il faut voir où sont les origines de la haine.
Une fois "chassés" d'Algérie et réinstallés sur le sol français, de très nombreux "Pieds Noirs", au lieu de tourner la page, s'arrangèrent pour diffuser une inimitié revancharde et virulente à l'encontre de "l'Arabe", du "bicot", du "crouille", du "bougnoule", du "raton" (j'en passe...), comme si la guerre semblait ne jamais devoir prendre fin. Les agressions contre les immigrés et rejetons d'immigrés originaires d'Afrique du Nord furent, durant les années 1960, 1970 et 1980 (j'en ai nettement le souvenir), monnaie courante, au point qu'une haine du "Nord'Af", de l'"Arabe", puis de sa religion, l'islam, s’enracina, de fil en aiguille, comme un mauvais cancer dans l'ensemble de la société française.
Les Maghrébins - même les Harkis, c'est dire ! - se sentirent, à raison, méprisés, craints, ghettoïsés et détestés par tout le reste de la population - qui s'ingéniait à les maintenir dans leur position subalterne.. Toutes les tentatives qu'ils firent, durant toutes ces années-là, pour s'intégrer et, en ce qui concerne plus spécifiquement leur progéniture née et grandie en France, pour réussir - furent systématiquement contrées par cette hostilité qui avait le ressentiment pour origine : ségrégation à l'embauche, marginalisation dans des cités périphériques (les fameuses "banlieues"), orientation systématique par les conseillers d'orientation scolaires vers des filières manuelles, techniques (dévalorisées par la société française), vexations de toutes sortes (harcèlements policiers, rejets des jeunes à l'entrée des boites de nuit, refus, déguisés ou non, de locations de logements situés dans des quartiers de "gens bien comme il faut"...quand ce n'était pas ratonnades et assassinats au fusil de chasse depuis des fenêtres de HLM).
Après la crise de 1973, le chômage frappa de plein fouet, prioritairement, la descendance de cette population travailleuse et peu lettrée, implantée en France par les patrons, avec l'accord des pouvoirs publics (parce qu'elle coûtait moins cher et était sensée se contenter de peu). Qui dit chômage massif, endémique dit situation de précarité. Qui dit situation de précarité dit grave dégradation du mode de vie et, en conséquence, gros risque de verser dans l'assistanat, ou la délinquance. Tout cela n'a absolument rien de racial, encore moins de culturel. Ni rien non plus de religieux. Qui sème la haine récolte la haine. Et que dire de qui sème le mépris, la volonté de dégrader ?
Las de devoir "expier" "éternellement les accords d’Evian et profondément désireuse de faire partie du lieu où ils étaient nés et avaient grandi, les jeunes BEURS ont lancé un véritable "appel au secours" avec leur fameuse marche - totalement pacifique - de 1983, au moment même où hommes politiques et médias commençaient, de concert, à accuser "l'Immigration" de tous les fléaux de l'hexagone. Il était encore temps de redresser la barre, mais cela échoua. Mitterrand et son Parti socialiste détournèrent ce mouvement-là à leur profit, en créant SOS-Racisme, qui "noyait le poisson" du problème beur en lieu et place de le résoudre.
C'est alors que, pour échapper à l'engrenage chômage-désorientation-bizness frauduleux-drogue, un nombre de plus en plus important de cette jeunesse paumée, sans identité, complètement abandonnée à elle-même et donc, en quête de SENS, se tourna vers des valeurs religieuses issues de la culture de ses parents et aïeux, qui lui apparurent comme structurante, stabilisatrices (faute d'autre chose). On vit apparaître des voiles, et des mosquées improvisées qui, disons-le, détournèrent beaucoup de jeunes filles de la prostitution plus ou moins occasionnelle et beaucoup de jeunes gens de la "mauvaise conduite", si ce n'est de la "descente aux enfers".
Mais même cela se trouva très vite en butte aux persécutions, et il fut décidé- en plus ou moins haut lieu - que les "Arabes" étaient "communautaristes" et "inaptes à l'intégration". On monta outrageusement en épingle des "affaires" dérisoires impliquant quelques adolescentes qui arboraient, de leur propre chef, des foulards au collège.
Du coup, on ressuscita le très ancien "syndrome de Poitiers" : tant que les Sarrazins existeront, ils chercheront à prendre le dessus, et à (re)créer une "Eurabie". Ceux qui vivent sur le sol européen constituent une "cinquième colonne". Paranoïa et propagande.
La rancœur grandit encore plus dans les populations déjà ghettoïsées à mort.
Les fondamentalistes et sectaires musulmans épris de guerre de religion profitèrent amplement de l'"aubaine".
Et nous en sommes...où nous en sommes.











P. Laranco
le 12 août 2016.

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