Entre nous, il y a la lumière; il y a ce
ciel sans nuages aussi, tout comme ces mendiants à demi dévêtus, la laideur des
faubourgs, l'odeur nauséabonde des caniveaux, les chiens errants et
l'indifférence de ces passants désincarnés.
Mais, il y a surtout tes yeux, à demi-clos,
qui peinent à cacher cette possibilité de l'ailleurs, de cette transgression à
venir, de cet interdit qui t'aimante et qui nous occulte même quand tu te
blottis tout contre moi.
Et je ne suis pas dupe, tu sais.
Et je ne ris plus avec les dieux. Et je n'ai plus envie de croire au soleil ni
à l'évidence de la mer. Je ne cherche même plus les éraflures de la mémoire et
de l'hiver. Je suis dans le silence et je me cache de ce vent léger où flottent
les désirs et les mots qu'il faut oublier.
Aujourd'hui, je ne cherche plus qu'à me
taire; je ne cherche plus qu'à raturer les manuscrits, qu'à défaire le récit de
chaque instant, qu'à combler les sillons de l'aube, qu'à narguer la sécheresse
de ces nuits où tu continues, perfide, à faire semblant à chaque caresse, à
chaque baiser, à chaque vers psalmodié.
Mais je refuse le déni, tes lèvres, ton
parfum et le parchemin de tes mots d'amour.
Et la terre qui nous portait a cessé de
trembler. Et je ne tressaille plus quand tu es là. Et je ne balbutie plus quand
je te revois. Et je ne m'inquiète plus quand tu t'absentes.
Il y a entre nous ton cœur changeant, une
hésitation dans le rythme et le flux quand je suis là; de la désinvolture et
des oublis quand je ne suis plus là.
Tu vois, je ne suis plus que moi. Et tu n'es
plus la condition de ma parole et du poème.
Entre nous, il n’ y a plus qu'une page
blanche.
Elle me sera utile. Pour ne plus te nommer.
À chaque instant.
Gillian GENEVIÈVE.
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