Le Temps est la
colonne vertébrale mouvante de l’univers.
Le temps, l’évolution
des choses et le changement, le renouvellement perpétuel que celle-ci apporte
font en sorte que nous traversons sans cesse des « deuils ».
Le passé, conséquence
de l’hémorragie incessante des années, des mois, des jours, si ce n’est même des
heures, des minutes et des secondes, peut, en tant que perte, constituer une
source de deuil sans répit pour la conscience humaine.
C’est ce qui
expliquerait que les personnes les plus âgées – celles qui ont le plus « perdu »,
le plus laissé de passé derrière elles – soient, on l’a souvent constaté, les
personnes les plus conservatrices et les
plus accrochées à leurs souvenirs.
Notre être est un
tissu de réceptivités.
Tout est inachevé,
ouvert,
et immensément en
attente,
comme une oreille que
l’on tend,
une esquisse
criant sa faim
Quelle qu’elle soit,
quelque soit son intensité et le temps qu’elle dure, la « reconnaissance »
(quand elle survient) est à tout coup limitée – et temporaire.
Il y a toute une
tradition typiquement française de gauche cocardière et maçonnique qui continue
à voir l’Occident (et, en première ligne, bien sûr, la France) comme « le
modèle civilisationnel absolu », le « guide planétaire », le
dispensateur par excellence des Lumières de la Raison sur le reste du monde
encroûté dans « les ténèbres » encore habitées de « sauvagerie ».
Le bon vieux Jules Ferry, apôtre du « colonialisme de magister », a
encore bien des héritiers !
En un certain sens, on
peut dire que c’est la séparation des sexes qui est le principal obstacle au
fait que les femmes ont tant de difficultés à faire reconnaître leurs talents
intellectuels et créatifs à l’égal des hommes.
Toute séparation
creuse un fossé, voire un abysse, entre ceux qu’elle sépare. Dans le cas qui
nous occupe, la séparation qui s’opère, plus ou moins spontanément, dès l’âge
tendre, entre petits garçons et petites filles, ne fait qu’ajouter à la
différence d’ordre biologique qui s’inscrit dans le corps, que l’outrer
lourdement.
Les petits garçons
prennent l’habitude de s’appuyer sur leur « meute » de copains et ces
solidarités très puissantes joueront, par la suite, très efficacement tout au
long de leur vie, dans le cadre d’un monde où tout leur fera sentir que ce sont
les membres de leur propre sexe qui détiennent le pouvoir suprême.
Ces copains sont
souvent unis par les mêmes types d’activités et de centres d’intérêt, d’où,
automatiquement pour ainsi dire, les filles et femmes se trouvent exclues du
fait, tout simplement, du manque d’habitude.
Rares sont les petites
filles et les adolescentes à se voir intégrées à part entière à des bandes de
jeunes garçons ou hommes, où elle (quand ce n’est pas leurs parents) craignent
de se voir exposées à l’excès d’appétit sexuel masculin.
Quelques soient leurs
capacités, leur valeur en terme de
créativité et/ou d’intellect, les filles et femmes manquent cruellement des
soutiens précieux qu’apporte le « cercle de copains complices »
(lequel, hélas, n’a aucun équivalent au sein de l’univers féminin) et resteront
par conséquent isolées, comme des francs-tireurs, en quelque sorte à mi-chemin
entre l’univers des garçons et celui des filles. Perspective assez peu
réjouissante et très propre à entamer leur confiance en elles !
Les seuls rapports envisageables
entre hommes et femmes se réduisent-ils à ceux –somme toute très basiques – qui
reposent sur l’attirance sexuelle ou l’attachement de l’enfant à la mère ?
Heureusement que Dieu
a fait les femmes, ne serait-ce que pour contrebalancer (un peu) le trop d’action
des hommes, leur goût immodéré du risque, leur manie de foncer dans tout dans
le but de « maîtriser à tout prix » et leur sensibilité quelquefois un
peu « infirme » !
L’avenir existe déjà,
puisque, comme l’ensemble du temps déroulé, il est compris dans cet hologramme
que se trouve être notre univers (*). Simplement, notre position temporelle
(forcément dans le présent) nous empêche de le connaître.
Celui/celle qui
cherche de manière excessive et par des biais outrés à attirer l’attention sur
sa personne finit souvent par récolter le strict contraire de ce qui était l’objet
de ses espérances obsessionnelles : il/elle agace, lasse tellement que
tout le monde en arrive à se détourner de lui/elle.
Car, voyez-vous, s’il/elle
avait tant soit peu de jugeote et de sens psychologique, il/elle saurait que
les gens ne détestent rien tant que l’on tente de contraindre leurs réactions
et leurs façons d’être.
Etre du côté des
forts. De ceux qui ont le pouvoir.
Ça rassure toujours l’Homme.
On préfère toujours s’identifier
à ceux qui tiennent le haut du pavé – voire à ceux qui agressent – plutôt qu’aux
faibles, aux démunis, aux victimes, aux pauvres et aux timides.
La force – en particulier
la force physique – et le culot impressionnent. De façon instinctive, tripale.
Voilà qui en dit long,
terriblement long sur le caractère somme toute superficiel de nos belles
professions de foi humanistes et sur ce qui nous relie encore à notre
immémorial passé d’Homme des cavernes, d’animal, même !
Au fond de lui-même,
finalement, tout être humain aspire à grandir en force, à monter en puissance,
à acquérir plus d’ascendant sur les autres, plus de capacité à en imposer
et donc plus de
possibilités, plus de chances de combler ses désirs matériels, de mieux jouir
de la vie en accaparant plus de ressources – fût-ce au détriment de certains de
ses semblables.
On ne peut pas nier ce
fait : l’être aspire à l’expansion, à l’ascension et au triomphe, qui
sont, à ses yeux, des signes de force, de volonté, d’énergie. « Vae victis ! »,
voilà quel est le véritable credo de l’humanité. Un credo droit issu du monde
animal et, plus loin encore, de l’ensemble du monde vivant.
La fascination pour
les puissants, les chefs, les « hommes forts », les nantis est, chez
l’Homme, une pente aussi ancienne que naturelle. Sans doute parce que nous
associons toujours le mot « faiblesse » au mot « danger »
et par conséquent aux mots « peur » et « répulsion »…
Chez l’Homme, la
crainte de la mort est sans doute fortement liée à la vie de groupe, à la force
et à l’intensité du lien social.
Au commencement, l’attachement
intense qui devait lier entre eux les membres des tout premiers groupes humains
– ou même pré-humains – a probablement, à un moment donné, dû rendre
insupportable la mort, en tant que vide relationnel aussi soudain que durable
et inexplicable. La disparition des proches, des compagnons et des semblables a
dû, par la séparation, la fracture dans les habitudes relationnelles qu’elle
induisait, introduire un très grand état de manque ; n’oublions pas non
plus que les premiers groupes que formaient nos lointains ancêtres étaient, les
paléoanthropologues ont pu le déterminer, très petits ; dès qu’un des
membres manquait, cela devait, par voie de conséquence, constituer une lourde
perte, voire une menace pour la vie du groupe toute entière. De fil en
aiguille, à mesure que l’être humain devenait de plus en plus intelligent et de
plus en plus sensible – donc de plus en plus empathique – (en raison du
développement de ses neurones-miroirs), le trouble qu’apportait la mort
dégénéra en véritable catastrophe, en authentique atteinte, tant individuelle
que communautaire. C’est alors (vraisemblablement, avec Neandertal ou juste un
peu avant) que l’on ressentit le besoin de rites funéraires, dans le but de
ressouder le groupe en apaisant les esprits troublés autour d’une cérémonie qui
avait pouvoir de donner sens. Pour atténuer le sentiment de perte – pour consoler,
en somme – les proches et l’ensemble de la petite communauté qui subissait la
perte, on commença à dire, à croire que le défunt n’était pas vraiment mort
(déni), mais qu’il s’en était allé vers un au-delà, un autre monde que seule la
mort pouvait lui ouvrir et où il continuait à vivre sous une autre forme (une
forme invisible à l’œil des vivants, mais toujours capable de communiquer avec
eux, de rester en lien avec eux).
Pour les besoins de
cette croyance – qui était devenue, entre temps, au plan psychologique, vitale –
on sépara du corps inerte et virtuellement pourrissant, guère plus capable de
communiquer, une autre entité, plus abstraite, plus fantastique et plus « pure » :
celle de « l’esprit ».
Qui sait si ça n’est
pas ainsi que la dualité corps/âme a pris naissance ? Dans cette négation
de la mort ?
P.Laranco
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