Ramène ta carte d'identité nationale
mais d'abord pourquoi tu veux cette lettre
ton fils travaille, va t-il à l'école...
il est mort sur la place avec les autres
moi je suis restée comme un vieil épouvantail
on m'a ramené son linge abimé et son corps
ouvert à partir des yeux que j'aimais tant
quand il me regardait souriant pour me dire
elle pense à quoi maman...
je n'ai plus de carte d'identité
Mon fils est tombé sur les dalles froides
m'a t-on dit
je ne l'ai pas vu trébucher le chéri
j'épluchais de maigres pommes de terre
en chantant un air de liberté...
j'ai sa carte avec sa photo si tu la veux
elles sont restées intactes étrange n'est ce pas!
dans ce fracas de l'âme où rien ne persiste
ni les cris ni les poings brandis haut le cœur
mon petit fougueux s'est élancé vers le feu
qui l'a refroidi si vite..
je garde aussi la carte de son père
je ne sais plus laquelle...il en avait tellement
cheminot...docker...chômeur vers la fin
comme presque tout le monde là-bas
il s'est éclipsé sous terre à côté des siens
mort à la guerre...le siècle dernier
ne me laisse pas courir derrière les mots
mon enfant j'ai le cœur feu et tu es si jeune
pour tant de poussière...
pour la lettre rédige-moi juste quelques lignes
pour la forme
cela m'aidera à porter mon fils
Ouhibi Khaled SAIDI.
Mars 2011.
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