lundi 14 septembre 2015

Un texte de François LAUR : PORTE.

N’est-elle pas digue dressée contre univers, rumeurs et importuns, mais vers laquelle à tout moment se jette un coup d’œil : ah ! si enfin elle la passait ; si, même très avant dans la nuit, elle y toquait ?... Et la manière dont je vais la passer moi-même en quittant la maison, mon aisance ou ma gêne à tourner le bec-de-cane et franchir le pas pèse déjà sur le succès de l’entreprise qui se promet, m’accordant ou non d’être ponctuel au rendez-vous ; c’est que j’ai bien la clé de la serrure, mais pas celle de la journée sur laquelle ouvre la porte.
Que de fois, hésitant, suis-je resté devant la tienne : devais-je sonner, serais-je bienvenu ? L’énigme qu’elle dérobait allumait le désir et tout ensemble suscitait le doute ; je n’osais le risque d’être engrené dans une intrigue impossible à juguler. Mais ne m’était-il pas arrivé, reçu par des amis, d’ouvrir la porte d’une chambre et d’aussitôt respirer comme le parfum d’une souvenance inconnue accroissant soudain l’étendue de ma vie ? J’ai poussé ta porte : le verrou n’était pas tiré.



François LAUR


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