vendredi 12 septembre 2014

L'ALCHIMIE de Umar TIMOL.


Ainsi celui qui écrit puise dans les tréfonds de son être, il ne récuse aucune impudeur, il sait toutes ses obscénités, il sait toutes ses absences, il y puise une substance, boueuse, confuse, pétrie de caillots et de débris, la substance de son corps et il en fait la matière de ses mots, substance macérée qui se mue, lors du rituel de la poésie, en matière, la matière des mots, mots tissés dans la page, mots qui sont le prolongement d’un corps, non dans ce qu’il a de superficiel ou d’anodin mais prolongement de ses abîmes, corps sans censure devenu substance, devenu matière, devenu mots, mots inscrits dans les pages d’un livre, livre en quête d’un regard, d’un autre, un regard qui parfois survient, un regard qui se reconnaît dans le livre, livre-miroir, miroir-livre, regard qui s’imprègne de ces mots parce qu’ils lui parlent, parce que ces mots le touchent, ces mots l’émeuvent, ces mots parfois le brisent, mots qui pénètrent dans son corps, mots qui sont la substance de celui qui écrit, qui se dispersent dans son corps, dans le corps de celui qui lit, qui se mêlent à sa mémoire, ses larmes, ses rêves, mots désormais si présents en lui qu’ils lui sont invisibles, les mots de l’autre, de celui qui écrit, mots qui proviennent d’un corps et qui se transvasent dans un autre corps, la substance de l’un qui devient celle de l’autre, écrire est ainsi transmuer son corps en des mots qui deviennent, par la force d’un regard, d’un désir, les mots des autres, c’est un corps à corps par l’entremise de la littérature, alchimie des corps, alchimie des mots, alchimie d’un être, celui qui écrit, de sa substance en beauté, beauté des mots, beauté qui ne cesse de renaître en l’autre, celui qui lit, beauté qui ne cesse de vagabonder dans le corps de l’autre, alchimie de sa substance qui devient la substance de l’autre, alchimie qui réunit le corps de celui qui écrit au corps de celui qui lit.


Umar TIMOL.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire