Dès la page 28 de cet énorme livre
(qui en compte un total de 509), nous recevons un choc : les principes physiques fondamentaux imposent
que si l’univers est infiniment vaste, alors c’est qu’il abrite une infinité de
mondes parallèles – certains identiques au nôtre, d’autres très différents,
sans la moindre ressemblance avec notre monde.
Or, tout porte désormais à croire que
notre univers est énorme –même si nous ignorons encore s’il est fini ou infini.
Sa vastitude l’apparente donc fort à
une entité sans fin et il est, au surplus, en expansion permanente.
Le reste coule de source : Dans un univers infini [ou ce qui peut
être considéré comme tel], la majeure
partie des régions se trouvent au-delà de ce que nous pouvons observer. Nous
ne pouvoir pas voir au-delà de 41
milliards d’années-lumière, et cette distance constitue l’extrême limite de
ce les savants ont choisi de dénommer notre HORIZON COSMIQUE.
Les régions qui s’étendent au-delà des
limites de cet horizon cosmique ne peuvent, en aucun cas et d’aucune façon,
interagir avec la nôtre, et peuvent par conséquent tout à fait être vues comme
des univers totalement
indépendants les uns des autres (mettons des sphères de 41 milliards d’années-lumière).
De plus, ces univers à part entière se
révèlent être si nombreux (compte tenu
de la taille même de l’univers global) que chacun d’entre eux admet un nombre
quasi infini de répétitions. […] si l’arrangement de particules que nous
connaissons [à savoir notre portion d’univers global, notre monde] est dupliqué dans […] un autre horizon
cosmique, alors [celui-ci] ressemblera
[au nôtre] en tout point. […] Plusieurs copies parfaites de nous-mêmes
existent donc quelque part au fin fond de
l’univers ! On a même été jusqu’à calculer que Dans chaque série de 10 puissance 10122 horizons, nous pouvons […] trouver,
en moyenne, un empiècement
[partie du gigantesque patchwork]
parfaitement identique au nôtre […].
Encore est-ce là une évaluation qui ne
tient pas compte des copies approximatives,
lesquelles, elles, doivent être encore bien plus nombreuses (Après tout, s’il n’y a qu’une seule façon de
reproduire une région de façon exacte, il y en a beaucoup plus de la recopier
presque exactement).
Tout cela donne…la THÉORIE DU
MULTI-UNIVERS FAÇON PATCHWORK.
Mais elle est loin d’être la seule
théorie à suggérer, à soupçonner la réalité cachée
des mondes parallèles, et autres dimensions multiples.
Le MULTIVERS est devenu, à vrai dire,
une donnée incontournable de la science physique contemporaine.
En tout, ce livre n’aborde pas moins
de neuf théories impliquant la possibilité que notre univers fasse partie
d’un multi-univers.
Toutes reposent sur de solides
étayages de raisonnement et d’équations.
Mais toutes débouchent sur de tels
niveaux d’abstraction et de complexité, à des échelles si colossales, qu’elles
sont à la frontière du spéculatif et de plausible. Ce qui signifie que, pour
l’instant du moins, elles sont encore, dans leur essence, à l’état de
suggestions.
Les comprendre, les assimiler, les
« vulgariser » est bien souvent une gageure.
Mais combien fascinantes apparaissent
leurs implications !
La THÉORIE DU MULTI-UNIVERS
INFLATIONNAIRE est un prolongement de la THÉORIE DU BIG BANG.
Au début des années 1960, Arno PENZIAS
et Robert WILSON captèrent, pour la toute première fois, l’écho du fond cosmique de rayonnement micro-ondes,
lequel, En quelques dizaines d’années
après sa mise en évidence, devint un outil majeur des recherches en cosmologie,
car lorsque
nous observons les photons du fond de rayonnement cosmologique, nous voyons
l’univers tel qu’il était voici près de 14 milliards d’années.
Il y aurait plus de 400 millions de ces photons fossiles dans chaque mètre
cube de notre espace.
La température de ce rayonnement a été
finement mesurée grâce à des appareils
astronomiques (COBE, Planck) extrêmement précis. Mais pourquoi est-elle si globalement uniforme dans l’espace ?
La réponse à cette question fut trouvée en 1979, par les savants GUTH, LINDE,
STEINHARDT et ALBRECHT, sous la forme d’un modèle que l’on baptisa THÉORIE INFLATIONNAIRE.
Il propose un nouveau scénario de la
naissance de notre univers : les tout premiers instants furent le théâtre
d’un démarrage ralenti qui dura
suffisamment longtemps pour permettre aux températures de s’équilibrer (d’où le
caractère uniforme du rayonnement de fond cosmologique) ; ensuite, se
produisit une salve d’expansion
frénétique, cataclysmique, que l’on dénomma L’INFLATION.
Cette inflation, ce n’est pas autre
chose que de la gravitation répulsive
– encore désignée par le terme d’antigravitation,
qui est elle-même l’expression d’un CHAMP D’INFLATON (1).
Les théoriciens parvinrent à démontrer
que son intensité des premiers temps, absolument phénoménale, n’avait eu
d’égale que sa brièveté. Elle fut, en quelque sorte, un éclair, une véritable
fulgurance. Par la suite, elle se stabilisa, ce qui permit à notre univers de
« refroidir » et d’acquérir, peu à peu, son apparence actuelle.
La théorie de l’inflation existe, en
fait, en plusieurs variantes. Dans
nombre d’entre elles, la flambée
d’expansion spatiale n’est pas un événement unique. Il se pourrait même que ce phénomène à l’origine de notre univers observable – expansion rapide de l’espace,
puis transition vers une expansion plus douce accompagnée de production de
particules – puisse se reproduire inlassablement en divers endroits très
éloignés dans l’univers. De loin, l’univers serait criblé d’une myriade de
régions immensément distantes les unes des autres, chacune étant la conséquence
de l’inflation sur une petite portion d’espace.
Par ailleurs, une fois enclenchée, l’inflation
ne s’arrête plus jamais. On parle d’inflation
éternelle. Elle est régie par ce que les théoriciens nomment un champ d’inflaton (l’inflaton étant le
nom donné à la particule correspondante au champ quantique), et ce champ
quantique est, comme tout le reste dans
notre univers, […] sujet à l’incertitude quantique.
Ce qui veut dire que sa valeur subit des fluctuations quantiques
aléatoires, qui l’augmentent un peu par-ci et la diminuent un peu par-là.
Conséquence : les théoriciens de l’inflation comparent volontiers
l’univers à un…gruyère ! Figurons-nous l’univers comme un énorme bloc
de gruyère à trous […], avec les parties pleines correspondant
aux zones où la valeur du champ d’inflaton est élevée, et les trous aux régions
où sa valeur est faible. Autrement dit, les trous sont les portions de l’espace
qui ont traversé [la phase] d’expansion
exponentielle et converti l’énergie du champ d’inflaton en un bain de
particules qui ont fini par s’agencer en galaxies, en étoiles et en planètes.
Avec cette image, nous voyons que ce gruyère cosmique a de plus en plus de
trous : les fluctuations quantiques font tomber la valeur du champ
d’inflaton en divers endroits, de façon aléatoire. En même temps, les parties
en fromage s’étendent de plus en plus puisqu’elles sont soumises à l’expansion
inflationnaire créée par leur champ de haute énergie. […] Dans le langage plus
habituel à la cosmologie, chaque trou est appelé un « univers-bulle ».
Ainsi nous vivrions donc dans une de ces « bulles »
gigantesques, elle-même incluse, parmi une infinité d’autres bulles tout
aussi colossales, à l’intérieur d’un ensemble aux dimensions irreprésentables
et en état d’expansion phénoménale et
éternelle !
Cela semble cohérent, et relativement facile à comprendre, à se
représenter.
Cependant, qu’en est-il des indices
concrets susceptibles de venir confirmer cette vision des choses ?
Les mesures du fond de rayonnement cosmologique plaident-elles tant
soit peu en faveur de ces idées d’une
expansion inflationnaire fabriquant [inévitablement] une nuée d’univers
parallèles ? Eh bien, il se trouve que la réponse est oui. Des écarts observables de température se
signalent bel et bien dans le fond de rayonnement micro-ondes, tel qu’il apparaît révélé aux appareils de mesure. Elles apparaissent sous forme de tâches sombres et de tâches claires
correspondant à des écarts de température de
l’ordre du millième de degré, les tâches sombres étant plus froides. A la fin de la phase d’inflation cosmique fulgurante,
les régions de notre univers-bulle qui se trouvaient dotées d’une énergie légèrement plus élevée
(donc, les régions les plus massives) exerçaient
une attraction gravitationnelle légèrement supérieure, laquelle leur permit
d’attirer à elles de plus en plus de
matière. Il en résulta un effet
boule-de-neige qui, jouant sur des
milliards d’années, déboucha sur la formation des réseaux de galaxies.
Ainsi, tout se tient ;
l’infiniment grand procède bel et bien de l’infiniment petit des microscopiques fluctuations quantiques
primordiales !
Si l’on continue de suivre la logique
de cette théorie inflationnaires proposée par les avants, les autres
univers-bulles nous sont – et nous demeureront – à jamais inaccessibles. Chacun
d’entre eux serait régi par […] les mêmes
lois physiques que les nôtres. Mais, de même que des jumeaux peuvent, dans des
environnements différents, grandir de manière très différente, des lois
identiques peuvent, dans des environnements différents, se manifester de
manière très différente.
[…] les univers du multi-univers inflationnaire peuvent chacun avoir leurs
propres caractéristiques physiques, même [s’ils] sont tous régis par les mêmes
mois fondamentales ».
Par ailleurs, il existe, entre
l’univers en patchwork décrit précédemment et les univers parallèles impliqués par la
théorie de l’inflation un lien profond et
merveilleusement satisfaisant, qui tient à des données d’ordre temporel.
[…] chaque univers-bulle du multi-univers inflationnaire est fini du point
de vue d’un observateur extérieur mais infini depuis l’intérieur. Si le
multi-univers inflationnaire existe, alors les occupants d’une bulle (nous)
sont à la fois des membres du multi-univers inflationnaire et de
l’univers en patchwork, et nous n’occupons qu’une seule
bulle. De par son caractère d’éternité, le processus d’inflation est, par
nature, sans fin et produit univers-bulle après univers-bulle.
Mais il existe une autre théorie- phare
de la physique contemporaine qui débouche également sur la possible existence
d’univers autres, lesquels formeraient tous ensemble un MULTIVERS. Je veux
parler ici de la THÉORIE DES CORDES.
La théorie des cordes s’est mise à
attirer l’attention des physiciens dans le courant des années 1980, suite à la
constatation (très contrariante et très troublante) que lorsque [ceux-ci, dans leur recherche d’une « théorie
unifiée » propre à rendre compte de l’ensemble du fonctionnement de la
nature physique ] appliquaient les méthodes de la théorie quantique des champs
à […] la gravitation – les mathématiques ne fonctionnaient plus, les calculs mêlant la mécanique quantique à la THÉORIE DE LA RELATIVITÉ GÉNÉRALE
donnant des résultats aberrants qui aboutissaient à une véritable
incompatibilité.
Au début des années 1990, les chercheurs qui
utilisaient ce nouveau modèle parvinrent, du fait de leurs calculs, à la
conclusion que notre univers pouvait faire partie d’un multi-univers. En fait, les mathématiques
de la théorie des cordes suggèrent que nous faisons partie non pas d’un mais de
toute une série de multi-univers différents.
La théorie des supercordes (ou théorie
des cordes) postule qu’en regardant de
très près une particule [dite] élémentaire, nous verrions vibrer une corde
minuscule (d’une taille de l’ordre de ce qu’on appelle la LONGUEUR DE PLANCK , laquelle
est égale à 10 puissance -33 cm, c'est-à-dire 100 millions de milliards de fois plus petite que tout ce que nous
avons pu explorer expérimentalement). Au cœur de l’électron, nous
trouverions une corde ; au cœur du quark, de même.
[…] les cordes constituantes de particules différentes sont [en tout
point] les mêmes ; ainsi la fameuse
« unification » tant recherchée par les théoriciens de la physique se
trouve-t-elle atteinte.
Ce qui crée la différence est quelque
chose de très subtil : c’est le fait que, tout en étant rigoureusement
semblables, les mêmes cordes vibrent
différemment, et créent, de la sorte,
les différentes propriétés des particules.
En fait, cordes vibrantes et particules sont une seule et même chose.
[…] les mathématiques de la théorie des cordes ne se contentent pas
d’autoriser que l’univers ait plus de trois dimensions, elles l’imposent.
Pourtant, il y a un
« hic » : la théorie des cordes s’avère très difficilement testable au plan expérimental. Elle ne
parvient à expliquer des résultats
expérimentaux – au demeurant nombreux – qu’en se convertissant en langage de théorie quantique des champs. Mais ce
n’est déjà pas si mal…
Peut-être un jour les accélérateurs de
particules de pointe (tels le LHC de Genève) ou encore l’étude du FONDS
COSMIQUE DE RAYONNEMENT MICRO-ONDES nous permettront-ils de valider plus
solidement cette théorie fort prometteuse car fort utile, actuellement, aux physiciens
dans leurs calculs.
En attendant ces moments bénis, le
modèle des cordes s’est révélé capable de donner
un sens à un phénomène mi-gravitationnel, mi-quantique : la SINGULARITÉ ; ce qui correspond exactement
à ce que les physiciens attendent d’une théorie
quantique de la gravitation, même si cela ne règle pas, pour autant, encore
les épineux problèmes que posent ces singularités extrêmes que sont les TROUS
NOIRS et le BIG BANG.
La théorie des cordes est une théorie
en cours d’évolution, encore passablement spéculative. Elle est d’une complexité qui défie
l’imagination : Toutes les
disciplines importantes et établies de la physique théorique – comme la
mécanique classique et la relativité générale – sont définies par une équation
centrale ou un ensemble d’équations. […] Longtemps, les recherches en théorie
des cordes furent confrontées à un défi […]. Trouver les équations centrales de
la théorie était si difficile que les physiciens ne pouvaient élaborer que des
versions approchées. […] les recherches étaient basées sur des approximations
d’approximations.
En fait, la théorie des cordes,
actuellement, se décline en 5 versions,
que les théoriciens ont réussi à relier en une théorie plus globale appelée M.
La théorie des cordes a réussi à
mettre en évidence des objets dotés
de 2, de 3, de 4, etc. (jusqu’au chiffre
de 9) dimensions spatiales, quelle a baptisés des BRANES (diminutif de
« membranes »). Ces branes peuvent
vibrer et onduler au même titre que les cordes.
Tout ceci implique que le nombre de dimensions spatiales
nécessaires à la théorie est égal
à…11 (en ajoutant la dimension Temps).
Et, de tout ceci encore, il découle
qu’à notre échelle, c'est-à-dire dans le cadre de notre cosmos tridimensionnel,
nous vivons sur une TROIS-BRANE qui constitue une véritable entité sur et dans laquelle nous nous
déplaçons. Voici posé le scénario des
MONDES DE BRANES.
Le monde de branes est un
multi-univers composé de branes qui sont autant de tranches de pain. L’espace
multi-dimensionnel de la théorie des cordes peut accueillir de nombreuses
branes-mondes parallèles, et Les mêmes lois fondamentales de la physique
s’appliquent pour toute la collection de branes, même si, là encore, les détails environnementaux comme la valeur
de tel ou tel champ imprégnant telle ou telle brane, ou même le nombre de leurs
dimensions spatiales, peuvent affecter profondément leurs caractéristiques
physiques.
La nature des cordes qui nous
constituent et qui composent la matière ordinaire, par ailleurs, veut que nous
soyons raccrochés à notre brane de façon
permanente, de sorte que nous ne
pouvons pas quitter notre brane. Il en va exactement de même pour les particules qui transmettent les
trois forces non gravitationnelles, parmi lesquelles sont les photons. Ce
dernier fait a pour effet d’empêcher toute possibilité de voir Une autre brane-monde, même si elle se
trouve à quelques millimètres de la nôtre.
Par contre, la particule à l’origine de la gravité, le GRAVITON, ne peut se
trouver piégée par les branes, car
elle est constituée de cordes d’une toute autre nature (les boucles). Elle peut donc quitter une brane et y revenir. Entre
les branes joue donc la force d’attraction gravitationnelle : les branes
s’attirent, exactement comme le font nos corps célestes !
Il est aussi fort possible que nous
vivions sur une brane en mouvement.
Cette brane en mouvement serait tout à fait susceptible de venir se heurter à une de ses voisines. Cela
occasionnerait, bien sûr, une émission colossale d’énergie, qui, tout aussi
sûrement, annihilerait toutes les structures
organisées au sein de chacune des branes soumises au choc. Il en
résulterait un nouveau Big bang, une sorte de renaissance cosmique.
Selon un spécialiste, STEINHARDT, les
branes auraient même la faculté de rebondir
lors de leurs collisions. A l’en croire, elles passeraient leur temps à
s’éloigner, puis à se rapprocher les unes des autres, avec, à la clé, des
collisions cycliques. Notre multivers serait le siège d’un TANGO DE COLLISIONS COSMIQUES dont chaque cycle complet (calculé par Steinhardt) serait de l’ordre de 1 000 milliards d’années ! Dans ce scénario, l’univers tel que nous le
connaissons ne serait que le dernier en date d’une série qui se succède dans le
temps. On le voit, cela donne le vertige. Cela rejoint les cosmogonies
traditionnelles cycliques des Hindous et des Bouddhistes.
Pour autant, cette thèse est encore
loin d’avoir des confirmations expérimentales concrètes : Si le LHC nous apporte des indices en faveur
des branes mondes et si les ONDES GRAVITATIONNELLES de l’univers primordial
restent insaisissables (2), le
multi-univers cyclique gagnerait beaucoup de partisans.
Mais la théorie des cordes ne s’est
pas contentée de spéculer sur les branes. […]
les nombreuses formes différentes que prennent les dimensions supplémentaires
qu’elle nous propose se sont vues, grâce à une manipulation théorique qui
s’applique à la combiner avec la cosmologie inflationnaire, transformées en plusieurs univers bulles différents.
Ceci donne lieu à ce qu’on appelle LE
PAYSAGE DES CORDES, dans lequel chaque univers bulle correspond à une
configuration particulière des dimensions supplémentaires – et se trouve
représenté, sur le schéma, très « montagneux », du paysage, par un creux
(encore appelé vallée) à la forme
très particulière, car unique en son genre.
[…] il existe des vallées dans le paysage des cordes dont la faible
altitude correspond très bien à la CONSTANTE COSMOLOGIQUE très faible mais non
nulle qu’ont mise en évidence [dans notre univers] les observations de
supernovae.
Le multivers qui correspond au paysage
des cordes contient toutes les formes
possibles des dimensions supplémentaires.
Mais la théorie de l’inflation et la
théorie des cordes ne sont pas les seules à impliquer l’éventuelle existence
d’une multitude d’univers. Figurez-vous que la fameuse MÉCANIQUE QUANTIQUE
n’est elle non plus pas en reste.
Les mesures de la mécanique quantique
sont des MESURES PROBABILISTES, mais néanmoins très sûres, parfaitement
corrélées aux données expérimentales.
Elles s’appliquent à toutes les
particules élémentaires de la matière que nous connaissons (photons,
neutrinos,muons, quarks), qu’elle décrit sous la forme double de
« particule » et d’ «onde de probabilité ». Dans cette
perspective, les gros objets sont
simplement des objets dont les ondes
de probabilité […] sont extrêmement étroites, ce qui veut dire qu’elles correspondent à une énorme
probabilité, quasiment égale à 100%, que l’objet soit situé là où se trouve le
pic de l’onde, et à une probabilité minuscule, à peine supérieure à 0 % d’être
situé partout ailleurs. A contrario, plus
un objet est petit, plus son onde de probabilité sera étalée ce qui
signifie que son onde comportera des probabilités importantes en différents
points. Le monde microscopique n’est qu’un brouillard probabiliste voué au flou et inaccessible à l’acte
d’observation !
En mécanique quantique, chaque
observation, chaque mesure n’est qu’un « choix » parmi tout un
registre de possibilités existantes.
D’après le physicien américain
EVERETT, la mesure d’une particule dont
l’onde de probabilité possède deux pics conduit à deux issues différentes,
lesquelles correspondent à deux positions,
lesquelles, à leur tour, correspondent à deux mondes parallèles. Dans cette proposition d’Everett, tout ce
qui est possible en vertu de la mécanique quantique (autrement dit toutes les
issues auxquelles la mécanique quantique attribue une probabilité non nulle) se
réalise dans son propre monde. Chaque pic d’onde correspond à un univers à
part entière. Ce qui implique directement l’existence d’un multi-univers quantique à
l’intérieur duquel toutes les
possibilités, et non une seule, […] se réalisent sans qu’il n’y ait ni ne
puisse y avoir la moindre interférence
entre les différents possibles. Idée réellement fascinante ! Reste que
cette idée émise par Everett reste une interprétation des données de la
mécanique quantique : Le
raisonnement quantique traditionnel
stipule que l’expérimentateur a 50% de chances de trouver l’électron dans
la position A et 50% de chances de le
trouver dans la position B. Alors que, dans l’approche [quantique] des
mondes multiples, ce sont les deux possibilités qui se réalisent simultanément,
ce qui annihile le rôle joué par les probabilités, pivot essentiel à la
mécanique quantique.
Alors ? Faut-il en revenir à l’INTERPRÉTATION DE COPENHAGUE pure et dure, qu’Everett, par son
interprétation, aurait tenté de dépasser ?
Non, car au moment de l’observation, [l’interprétation de Copenhague] se
renferme sur un pur silence mathématique. C’est un manque important, que
l’interprétation des mondes multiples tente de combler.
Voilà donc, pour ce qu’il est convenu
d’appeler le « multi-univers quantique ».
Passons à présent à une autre
possibilité de multivers : le MULTIVERS HOLOGRAPHIQUE.
Le voyage qui nous emmène vers cette étrange possibilité combine des
travaux fondamentaux émanant de divers horizons : des éléments de
relativité générale, des recherches sur les TROUS NOIRS, de la THERMODYNAMIQUE,
de la mécanique quantique et, pour les plus récents, la théorie des cordes, le fil rouge qui relie ces divers domaines de recherche étant la
nature de l’INFORMATION dans un univers quantique.
Un physicien réputé nommé WHEELER suggérait
que les objets – matière et rayonnement – soient envisagés comme […] de simples
transmetteurs d’une entité beaucoup plus abstraite et fondamentale :
l’information.
Il pensait que l’information - l’endroit où se trouve une particule, si
elle tourne sur elle-même dans un sens ou dans l’autre, si sa charge est
positive ou négative, et ainsi de suite -
représentait un noyau dur irréductible au sein de la réalité.
Nous ne serions que de la manifestation matérielle, que la réalisation physique de cette information.
Exactement comme, dans la Bagavad-Gita, le « manifesté » est une
expression du « non-manifesté ».
Cependant, Qu’est-ce exactement que l’information, et qu’est-ce qu’elle
fait ? . Aux yeux des mathématiciens, physiciens et informaticiens,
c’est net : l’information répond à
des questions : la mesure la
plus utile du contenu en information est le nombre de questions distinctes, à
réponses de type OUI/NON, auxquelles elle peut répondre ; Une donnée pouvant répondre à une simple
question OUI/NON est ce que l’on appelle un « BIT » […] c'est-à-dire
une représentation numérique de « oui » ou « non » [par 0
ou par 1]. L’ENTROPIE, quant à
elle, n’est autre qu’une mesure du
contenu en information d’un système. Or le célèbre Stephen HAWKING a montré
mathématiquement que l’ENTROPIE D’UN TROU NOIR égale le nombre de cellules de
taille de la LONGUEUR DE PLANCK qui seraient nécessaires, pour recouvrir son
horizon d’ événement et que Tout se passe comme si chacune de ces
cellules recelait un bit, une unité élémentaire d’information. Avec son
confrère BEKENSTEIN, il démontra ensuite que pour un
trou noir, la capacité de stockage de l’information est déterminée non pas par
son volume intérieur mais par L’AIRE DE SA SURFACE. Cela signifie que
chaque bit d’information caché, stocké dans un trou noir correspond à un CARRE
DE LA TAILLE DE PLANCK, et non, comme on aurait pu raisonnablement s’y
attendre, à un cube de cette même taille.
Par la suite, les physiciens Gerhardt
t’HOOFT et Léonard SUSSKIND ont étoffé ce raisonnement en prouvant qu’on
pouvait non seulement l’appliquer aux trous noirs, mais également à
n’importe quelle région de l’espace.
L’information nécessaire pour décrire les phénomènes physiques au sein de
n’importe quelle région de l’espace peut être encodée complètement par les
données [figurant] sur la surface qui entoure la région considérée.
Autrement dit, toujours d’après
t’Hooft et Susskind, Notre réalité
habituelle à trois dimensions […] serait comparable à une PROJECTION
HOLOGRAPHIQUE de processus […] bidimensionnels situés, pour
leur part, à grande distance. Nos expériences ici et cette réalité
distante là-bas formeraient les plus intimement liés des mondes parallèles !
L’édifice théorique qui a permis de tirer ces conclusions est logique,
cohérent et construit avec soin. Mais il n’empêche que,
loin de se suffire à lui-même, il appelle des questions très importantes :
Lorsque nous parlons d’information
résidant sur la sphère entourant une région donnée de l’espace, qu’est-ce que
cela signifie réellement ? Comment l’information se
manifeste-t-elle ? Quelle forme prend-elle ? Dans quelle mesure
pouvons-nous élaborer un dictionnaire explicite pour traduire les phénomènes
ayant lieu à la frontière en ceux qui ont lieu à l’intérieur ?.
Seul, actuellement, le physicien
argentin MALDACENA, en utilisant la théorie des cordes, est parvenu à démontrer
de façon convaincante que tout ce qui,
dans [un] univers particulier doté, mathématiquement
parlant [d’]une frontière, [d’]une surface impénétrable qui entoure
complètement son intérieur – existe est le reflet de lois et de processus qui se
déroulent à sa frontière, en sorte que […]
nous avons désormais une preuve que nous pouvons tisser un lien entre ces idées
théoriques et la physique de notre univers !
Ainsi, si l’on en croit l’étonnante
logique de tous ces calculs, nous ne serions que la réalisation holographique des lois
physiques qui régissent notre propre univers, et l’analogie avec
l’hologramme serait frappante. N’oublions pas que Les hologrammes tels que nous les connaissons [et les produisons] n’ont aucune ressemblance
avec les images tridimensionnelles qu’ils produisent. Sur sa surface, le
plastique est strié de lignes, d’arcs et de volutes. Et pourtant, une opération
complexe, obtenue en éclairant le plastique au laser, transforme ces marques en
une image tridimensionnelle identifiable. […] l’hologramme en plastique et l’image
tridimensionnelle recèlent les mêmes données, mais en deux versions
différentes, dont chacune semble complètement
cryptée par rapport à l’autre. Nous avons, dans le cas cosmique qui nous
occupe, affaire à deux échos, à deux formes d’ « incarnation » qui
sont reliées par un phénomène inconnu faisant office de laser et que les
physiciens connaissent désormais sous l’espèce de ce qu’ils appellent un dictionnaire mathématique permettant de
faire la traduction du texte formulé
dans le langage (et donc, selon le point de vue) de la théorie des cordes en
langage appartenant à la théorie quantique des champs. Sur la
« frontière » de l’univers, un de nos trous noirs pourrait ainsi se
traduire par un bain de particules à
haute température.
Les mathématiques elles-mêmes
débouchent sur la diversité des points de vue, des traductions, des
manifestations ! Elles semblent y être contraintes par l’extrême
complexité de l’univers. Ce qui est étrange, c’est que la physique propose, de
la sorte, plusieurs langages (ou plusieurs traductions simultanées d’un même
phénomène ?). N’est-ce pas la preuve qu’il existe – bel et bien –
plusieurs réalités ?
Le principe holographique est une idée unificatrice ; Le fait que la théorie des cordes inclue le
principe holographique et fournisse des
exemples concrets de mondes parallèles holographiques témoigne
[incontestablement] de la manière dont les travaux à la pointe des recherches
se concentrent vers une synthèse profonde.
Est-on, ainsi, en passe de prouver que
le divers, le complexe n’est, en fait, qu’une expression de l’Un ? Que nos
« langages » mathématiques différents ne sont que l’expression de la
nature forcément parcellaire, limitée de notre pouvoir de connaissance ?
Lorsque nous laissons le volant aux rouages mathématiques des principales
lois physiques existantes, cela nous mène chaque fois vers une version de
mondes parallèles.
Les savants, dans tout cela,
paraissent avoir une idée de plus en plus précise de ce que peut être notre
univers et, partant, plus généralement, de ce que peut être UN UNIVERS. C’est
ainsi qu’ils ont été amenés à formuler l’hypothèse hardie que la
« bulle » dans laquelle nous nous trouvons, tous autant que nous
sommes, englobés serait la résultante d’une sorte de trou noir inversé, appelé TROU BLANC ; Un trou blanc […] est un objet hypothétique qui recrache de la matière
plutôt que de l’avaler.
La complexité de tout ce que la
science, peu à peu, nous dévoile, aurait presque de quoi nous rendre fous. Très
sérieusement, l’ouvrage de Brian Greene n’hésite d’ailleurs pas à aborder des
problèmes apparemment sans rapport avec les sciences physiques : qui nous
dit que nous ne sommes pas piégés
dans une sorte de SIMULATION INFORMATIQUE, comme c’est le cas, par exemple,
dans le film MATRIX ?
Cette question – mi scientifique, mi
philosophique – résulte en fait de la nature même de l’expérience, telle que
nous la vivons, en tant qu’êtres humains : Si quelqu’un pouvait stimuler notre cerveau pour produire exactement
les mêmes impulsions électriques que celles que suscitent chez nous le fait de
manger une pizza, de lire cette phrase ou de sauter en parachute, eh bien
l’expérience serait pour nous indiscernable de la réalité. […] Comment nous
convaincre de la RÉALITÉ de la chair, du sang et du monde physique, lorsque notre
expérience n’est qu’une affluence d’impulsions électriques circulant dans un
super-ordinateur hyper-perfectionné ?.
D’après Wheeler, nous l’avons vu,
l’univers n’est qu’information, et l’information est constituée de bits. Nos
corps même sont la traduction, en langage de matière animée, des instructions
encodées dans une double hélice moléculaire…et, pour finir, nos cerveaux sont
des ordinateurs hyper-performants, qui ont même su décoder le langage (les
langages ?) mathématiques de l’univers.
Cela ne plaide-t-il pas fortement pour
une nature « informatique » de la réalité où nous baignons et qui
nous constitue ?
Et puis…l’Homme est désormais capable
de créer des simulations de plus en plus sophistiquées : Si l’on en croit l’histoire de l’innovation
technologique, itération per itération, les
[telles que SIMS et SECOND LIFE]
devraient gagner en vraisemblance et permettre aux caractéristiques physiques
et au vécu de ces mondes virtuels d’atteindre des niveaux convaincants de
nuance et de réalisme. Quiconque ferait fonctionner ce type de simulation
déciderait si les créatures virtuelles savent qu’elles existent dans un
ordinateur ou non […].
Dans une pareille perspective, qui
nous dit, par exemple, que nous ne faisons pas partie d’un monde virtuel créé
par nos propres (lointains) descendants ?
Pourquoi, non plus, ne pas imaginer,
ne pas envisager qu’il n’y ait pas qu’une
seule simulation mais un océan bouillonnant de simulations, qui serait
alors un multi-univers virtuel ?
Hypothèse séduisante pour tous les
tenants du « dessin intelligent », non ?
Le philosophe Robert NOZICK propose [lui] d’imaginer que nous appartenions à un multi-univers qui comprendrait
tous les univers possibles, le MULTI-UNIVERS SUPRÊME. Un théoricien habitué à parler mathématiques, renchérit le
scientifique Brian Greene, envisage le
multi-univers suprême de Nozick comme un multi-univers où toutes les équations
possibles mathématiquement sont réalisées physiquement. En effet, l’étrange manière dont beaucoup de concepts
mathématiques trouvent une application dans les phénomènes physiques montre
avec force que les mathématiques sont réelles. Qu’elles pourraient même
constituer l’essence, la quintessence de la réalité qui est la nôtre. Et
cependant, chose non moins étrange, leur langage provient de notre [propre] adaptation biologique d’êtres humains,
de créatures façonnées par l’évolution
pour comprendre l’organisation de notre environnement.
Voilà, peut-être, un phénomène qui
n’en finira jamais de nous surprendre…
Max TEGMARK, comme Brian Greene,
penche fortement pour cette hypothèse de
l’univers mathématique. Son argumentation ? Attendu que La description la plus fondamentale de
l’univers ne devrait pas nécessiter de concepts dont la signification repose
sur l’expérience humaine, ou l’interprétation. Les mathématiques – à travers une série d’opérations (comme les
additions) qui agissent sur des ensembles abstraits d’objets ‘(comme les nombres
entiers) pour produire des relations entre eux (comme 1+2 = 3)- sont
précisément le langage pour énoncer des faits non contaminés par l’humain.
Par voie de conséquence, l’idée
s’impose avec de plus en plus d’insistance aux scientifiques que l’abstrait et
le concret ont partie étroitement liée et que, donc, les opposer apparait comme
de plus en plus vain, et dénué de sens.
Il faut croire les mathématiques. Qui
nous ramènent toujours, de façon presque lancinante, comme nous venons de le
voir, aux univers multiples. Qui, de ce fait, nous orientent, nous
« détournent » presque inexorablement vers les chemins tortueux mais
non moins fascinants de la philosophie.
Brian Greene est un esprit
particulièrement brillant. Si brillant qu’on a parfois un certain mal à suivre
le cours subtil de sa pensée.
Il faut lire ce livre avec une
attention soutenue, avec une sorte de persévérance farouche.
Mais on ne le regrettera pas : le
réel est d’une richesse immense, confondante.
L’idée de multivers et ses multiples
variantes ont ceci de paradoxal que tout à la fois elles dressent une sorte de
butoir décisif sur le chemin de la connaissance et qu’elles n’en continuent pas
moins de suggérer, et donc, de stimuler la pensée humaine.
P. Laranco.
(1) au même titre que l’électron, ou le photon, l’inflaton est une
particule, pour le moment hypothétique, mais bien dans la logique de la
théorie.
(2) Il se trouve que tout récemment, en mars 2014, une équipe internationale de scientifiques a détecté, grâce au radiotélescope BICEP situé dans l'Antarctique, "la trace de
tremblements de l'Espace-Temps" dans un rayonnement
émis 380.000 ans après le Big bang.
A ce propos, lire l'article : "PREMIÈRE DÉTECTION DES ONDES GRAVITATIONNELLES DU BIG BANG", sur http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2014/03/premi%C3%A8re-d%C3%A9tection-des-ondes-gravitationnelles-du-big-bang.html
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