FRAGMENT.
Quand vous avez du mal à vous aimer, qu'il y a en vous ce vide, ce creux, cette chose qui vous ronge, qui vous dévore, quand vous fuyez votre miroir car il n'est pas fidèle à votre narcissisme, quand le regard des autres parfois vous brise, quand rien ne semble pouvoir vous guérir de cet absence d'amour, l'amour des autres, le vécu d'une passion, le dépassement de soi, quand ce vide se répand en vous, de façon inébranlable, qu'il sape vos élans, votre énergie, qu'il ébrèche l'édifice que vous avez patiemment construit, quand ce mal d'amour est si puissant qu'il vous empêche d'être et qu'il vous fait parfois préférer la mort à la vie, quand il vous arrive de vous abandonner à lui car vous savez qu'il est enraciné en vous tout autant que votre cœur l'est, que c'est votre destin, quand vous parvenez parfois à vous aimer et que vous comprenez que cela est éphémère, le sursaut de son contraire est d'autant plus violent, il est tentant de vouloir s'oublier, ainsi s'oublier dans des frénésies, celles des images, des mots, de la chair, s'oublier dans ses frénésies qui vous éloignent de ce que vous êtes, un exil consenti mais cet oubli n'est que la mémoire exacerbée de ce qui vous tue ou encore s'oublier dans le regard d'un autre, dans son désir qui ne sert pas à vous éveiller aux voluptés du lien mais à combler le vide en vous, cet oubli de soi en l'autre est d'une exigence absolue, en d'autres mots vous lui dites de vous aimer parce que vous n'arrivez pas à vous aimer, vous lui accordez ce droit, nul être ne mérite d'être le confident d'un semblable fardeau, nul amour, même celui qui aspire à la perfection, ne peut taire un tel silence, l'absence de soi est le miroir de l'absence de l'autre, vous vous cherchez dans l'autre et vous y découvrez votre propre solitude, et vous demeurerez ainsi jusqu'aux confluents de votre deuil, dont le pacte appartient à ce que vous reniez, l'amour.
Umar TIMOL.
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