Réveil en plein cœur de la nuit. Devant moi, mur
d’obscurité. Uniformité d’un seul bloc, aussi sombre que de la poix. Dense.
Lisse. Comme avant que le monde naisse. Masses nocturnes aux grains serrés, qui
jouent les unes sur les autres, un peu à la manière de lourds muscles.
Mouvement opaque et primordial, pâteux, qui
tient lieu de formes.
La nuit m’enveloppe. Je m’y perds. Elle se meut,
sans repères pour moi.
A part ma conscience et la perception visuelle, et
auditive que j’en ai, je suis fondue en elle. Il n’existe rien d’autre que ces
trois entités qui divergent, qui s’autonomisent, qui se jaugent : elle,
mes deux sens et ma conscience, qui bientôt sécrète mes mots (ou, du moins,
leur possibilité). Peut-être dans l’unique but de restaurer formes, directions ;
sens ; dans ce qu’ils ont de plus basique.
Moi; la nuit. Fusion inquiétante. Indifférenciation
qui pèse. Vide existentiel qui rassure.
Je ne sais plus que j’ai un corps.
Mon corps, c’est peut-être la nuit ; cet
entassement de masses vagues, confuses.
La nuit a un côté charnel. Une épaisseur qui
remplit tout. Le vide y est plein. Le plein y est vide. Etant donné que tout s’y
confond. Que la différence y est bannie. Que la séparation y achoppe.
La nuit est peut-être mon corps.
Patricia Laranco.
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