Avec le contexte de la pandémie, et la crise économique subséquente, les relations au travail risquent encore de se tendre.
Dans le domaine du harcèlement moral, des décisions de justice tombent chaque jour reconnaissant ce phénomène. Il faut donc constater que les dispositifs en place sont encore insuffisants, pour que les victimes soient obligées d'aller en justice pour obtenir une indemnisation, qu'elles doivent attendre des années. La prévention serait impérative.
Dernières jurisprudences :
Dans un arrêt en date du 8 décembre 2020, la Cour d'Appel de Paris a refusé de valider un motif de licenciement portant sur un litige entre salariés en considérant que l'employeur n'avait pas procédé au préalable à une confrontation entre ces salariés.
Dans un autre jugement de début d'année 2021, un juge de départage du Conseil des Prud'hommes reconnaît un harcèlement moral, alors que le CHSCT (devenu CSE) a déclaré qu'il n'y avait pas eu de harcèlement.
Situation des victimes - isolement :
En interrogeant les différentes victimes, il s'avère que celles-ci se retrouvent bien seules, et que même les syndicalistes ne les aident pas, eux-mêmes victimes de pressions. Les médecins du travail étant aussi salariés de l'entreprise sont victimes de menaces. Les employeurs passent outre les déclarations de situation de harcèlement moral, ils effectuent des enquêtes internes seules, sans en rendre compte au salarié, et procèdent au licenciement en sachant pertinemment qu'ils enfreignent la loi, jouant leur va-tout en considérant que le salarié n'ira pas au bout de la procédure juridique de réparation. Ils font fi aussi de leur obligation de résultat en matière de protection de la santé du travailleur (article L. 4121-1 du Code du travail).
Les salariés doivent aussi saisir le TASS (Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale) pour la reconnaissance d'accident du travail ou maladie professionnelle, les CPAM et les CRA refusant quasiment systématiquement les prises en charge, ce qui constitue une véritable "fraude sociale" et c'est encore un long parcours du combattant au niveau juridique pour la défense de ses droits, alors que la victime est atteinte dans sa santé, son moral, sa situation financière avec la perte d'emploi.
Nos propositions :
- Face à cette situation, il faudrait renforcer le dispositif avec l'obligation d'organiser des confrontations entre salariés, ou salariés et direction, selon les cas, avec présence de l'inspection du travail (ou agent/direction pour le secteur public).
- L'enquête "employeur" suite à la dénonciation de situation de harcèlement moral doit être faite en présence de syndicalistes et de l'inspection du travail qui doit présider l'action.
- Tous les documents doivent être transmis au salarié, il ne doit pas y avoir de "confidentialité", surtout concernant les rapports de l'inspection du travail qui doivent être diffusés à tous les salariés de l'entreprise (en masquant les noms des salariés concernés). Les salariés d'une entreprise ne doivent pas rester dans l'ignorance des pratiques managériales délictueuses de son employeur.
La confrontation permettant une égalité de traitement entre salariés ou salariés et direction, permettrait l'écoute, les démentis au fur et à mesure, car dans un dossier de harcèlement moral, les mensonges sont pléthore et la justice a de moins en moins de temps à consacrer à un dossier (problèmes budgétaires, manques de moyens, désintérêt).
Ensuite que ce soit au niveau prud'homal ou pénal, la justice n'organise pas de confrontations, ou les refuse, ou même les ignore : (mode de réponse classique de nos instances judiciaires : la non-réponse). Même dans le cas de violences conjugales, un Procureur de la République l'a déploré : les confrontations ne sont plus organisées.
Il faut rappeler que le harcèlement moral porte atteinte souvent irrémédiablement à la santé, quand il n'y a pas eu suicide, et que le temps que les tribunaux traitent le dossier, des victimes perdent tout jusqu'à leur maison ou appartement. Certaines se retrouvent même SDF, avec une petite pension d'invalidité.
Ces dispositions concernent aussi les travailleurs du public qui doivent s'adresser au Tribunal Administratif, sans possibilité d'intervention de l'inspection du travail.
Nous demandons donc aux Pouvoirs Publics de renforcer ces dispositifs dans le sens d'une plus grande protection du travailleur, d'autant plus que les mises en invalidité prononcées par la CPAM dans un tel contexte coûtent cher à la société.
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