vendredi 15 novembre 2013

QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LE RACISME...

Le racisme moderne est la justification d'une domination qui, âgée de maintenant cinq siècles, a la vie dure. Les gens qui appartiennent à la civilisation dominante s'y accrochent parce que ça leur permet de se sentir supérieurs. Par ailleurs cette position leur permet de maintenir à distance des gens qui, du fait de leur différence, de leur appartenance à un autre groupe, ethnique ou autre, suscitent leur peur viscérale.



Une société qui en vient à se chercher des boucs émissaires est toujours dans un triste état. C'est le (mauvais) signe qu'elle a laissé s'accumuler en elle beaucoup de frustrations, d'aigreur, de déceptions et de désirs inassouvis qui ont grossi sa masse d'hostilité, de rejet et de fermeture. Ses membres qui, au fond, n'arrivent plus à se supporter et se détestent (pour x raisons parmi lesquelles la vie stressante, le nombrilisme extrême et la compétition exacerbée ne sont pas les moindres) ont désormais besoin de focaliser leur rage, leur mépris et leur ressentiment sur tout porteur de différence, histoire de recréer un sentiment d'union, de cohésion, d'identité collective qui lui permettra de ne pas "imploser". Ceux qui jouent avec ces tendances-là jouent un jeu très dangereux...



Je dois avouer que j'ai un certain mal à comprendre la condescendance qu'ont l'habitude de manifester les populations des pays à fort niveau de vie envers celles des pays beaucoup plus pauvres où sévit ce qu'il est convenu d' appeler "le sous-développement". Comme si ces gens étaient d'une autre essence, de nature presque infra-humaine...
Associés - consciemment ou non - à la misère et à l'échec, à l'impossibilité de s'adapter aux normes "modernes" bénéfiques, ils sont, dans le meilleur des cas, volontiers assimilés à des objets d'assistanat, par conséquent de pitié. Leurs manques, leurs difficultés de "loqueteux" suscitent une forme non-dissimulée de répugnance qui accentue encore le fossé d’incompréhension et d'indifférence entre le Nord et le Sud.
Pour ma part, je n'y vois pas tant une attitude somme toute "compréhensible" qui s'expliquerait par la distance des niveaux de vie et par la radicale différence que celle-ci serait sensée instaurer qu'un héritage direct de l'ordre impérialiste et colonial méprisant qui s'est épanoui lors des cinq siècles précédents et qui, en cours de route, a construit le mythe de la soi-disant "nature à part, supérieure" des ethnies "blanches".
Rares sont, dans les contrées les plus riches et les plus "civilisées" de la planète les gens qui acceptent de gaieté de cœur de regarder trop longtemps en face le spectacle - sans doute trop "sordide", trop "insoutenable" à leurs yeux - du dénuement. Et, pas plus qu'on aime ce spectacle, on n'aime les gens qui vous le rappellent. Effet de gêne ? Réaction due à la culpabilité ? Sans doute, mais, souvent, ces manifestations psychologiques ont tôt fait de se muer en un renforcement de l'indifférence ou en un rejet pur et simple, brutal, qui s'explique par la peur et qui, dans certains cas, prend une connotation raciste. 



Parler - comme le font volontiers, à présent, les journalistes, en France - de "racisme ordinaire", n'est-ce pas une manière de banaliser, de normaliser, de déculpabiliser le racisme ?




P. Laranco.





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