samedi 2 décembre 2017

Un texte de l'écrivain mauricien Umar TIMOL, SCULPTER LE LUMIÈRE.



Je suis en quête de la nostalgie dans le visage de l'autre, la nostalgie du paradis perdu, de la lumière en soi, de la lumière d'avant la vie qui est la genèse de la vie, de cette lumière qu'on ne cesse de désirer, celle du paradis perdu. Tout être est de la nostalgie. On ne peut être autrement. Certes, le visage est parfois joyeux, parfois extatique ou triste ou las, mais au-delà de tous les masques, de toutes les apparences, il est cette nostalgie. Lieu fugitif dans le temps, espace qui creuse le temps, l'être enfin dévoilé, révélé, l'être qui se dit, se raconte, au-delà de la parole, l'être qui expurge son silence, l'être qui est, sans compromis, qui sait la langueur de l'absence. Quel est ce visage ? Sinon un poème. Ou un rêve. Que nous dit-il ? Le désir de la fusion, le désir de renouer avec ce qui ne peut être, le désir de la mort qui est le chemin vers la vraie vie, le désir d'être soi, réconcilié au-delà de tous les vides, de toutes les tentatives pour les combler, de la plénitude. Tout visage est ainsi rompu, ce qui le rend d'autant plus beau. J'ai cette exigence de la nostalgie, de sa beauté je ne sais trop pourquoi d'ailleurs, ainsi je ne sculpte pas l'autre avec la lumière, je ne suis pas hors de l'autre, dans un rapport objectif avec lui, mais bien en lui, je veux pénétrer littéralement ses yeux, être au plus proche de lui, être lui, durant cet instant, parvenir en ce lieu de complétude, lumière figée, visage figé, visage qui avoue, qui se confesse, qui énonce ce qu'il est. Et je dois me défaire ce que je suis, je ne suis plus moi mais un acte, une violence à la limite, celle de cette lumière dont je m'approprie, que j'exacerbe, je suis lumière, lumière qui se mêle à celle de l'autre, je suis son incandescence, je ne l'invente pas, je la découvre, je le saisis, je l'enfouis en moi, je le révèle au monde, je le révèle aux autres, à l'autre, je ne sais plus ce que je fais, est-ce une danse ou de la folie, je ne sais trop, je ne peux pas m'arrêter cependant, Peut-être que ce lieu est celui d'une possible transcendance, peut-être qu'elle n'est rien, que l'audace du néant mais il me faut cette nostalgie, l'inscrire dans la lumière. Tout visage est de la nostalgie du paradis perdu.






Umar TIMOL.





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