IDÉES FIXES
A chacun sa petite « idée fixe ».
Sa petite « obsession » personnelle.
Sa façon bien à lui de ramener à lui
le monde – de le rapetisser aux mesures, tronquées, limitées, de ses petites
dimensions.
Et, au-dessus de tout cela, ou
englobant tout cet agglomérat de ressentis, de visions du monde, de
motivations, de karmas, de partialité et de « partiellités »
parcellaires, il y a un Tout. Il y a, sans doute, une totalité, qui rassemble
toutes les grilles de lecture et d’interprétation du monde possibles, imaginables.
Ce Tout est l’absolu de la
perception, de la connaissance globale. Et ce Tout est (peut-être) ce que nous
aspirons, tous plus ou moins, à être. En secret, le plus souvent, car ne
sommes-nous pas – en tout et pour tout- que le produit (parfois triste) de nos œillères ?
Oui mais voilà…tant de gens
confondent la volonté de s’ouvrir à la vastitude de l’Univers avec la volonté d’imposer
à tous leurs idées fixes – elles-mêmes fruits de leurs limitations.
Oui – bien sûr-, me dira-ton, c’est naturel,
c’est tout ce qu’il y a de propre à la nature humaine.
Reste…là est l’origine de l’intolérance
et du conflit ; avec toute leur fâcheuse cohorte de conséquences.
On a parfois l’impression que tout
ce que nous demandons aux autres, c’est de nous « confirmer », de
nous « refléter » en quelque sorte, tels des miroirs.
De « donner raison » - si
peu que ce soit – à la justesse de nos idées fixes, et des motivations qu’elles
construisent.
Car nous et nos idées fixes ne
formons, au fond, qu’un seul et unique bloc.
D’une façon générale, l’Homme adore
penser par classements et par catégories. Il a tendance à « ranger »
tout ce qu’il perçoit, tout ce qu’il expérimente dans des « tiroirs »
aux cloisons étanches. Seulement, la vie, malheureusement pour lui, ne fonctionne
pas comme ça. Bien souvent, le plus souvent même, elle aime à « mélanger
les genres », et préfère les frontières poreuses aux lignes de démarcation
trop marquées, trop intransigeantes.
Le vrai monde ne ressemble pas
vraiment à l’image qu’en veut donner la pensée humaine. D’où la nécessité, pour
le cerveau, de se montrer plus souple, plus subtil. Une nécessité qui,
fréquemment, contrecarre sa paresse et son adhésion aux idées toutes faites du « prêt
à penser ».
La pensée de l’être humain est
volontiers réductrice, simplificatrice, péremptoire et « abrupte ».
Cela, en certaines circonstances,
peut s’avérer bon, et utile. Alors qu’en d’autres, cela rigidifie dangereusement
l’esprit et, en le rendant ainsi gourd, le fait inapte à interpréter
correctement ce qui l’entoure pour en retirer une plus juste vue.
Mais, heureusement, le monde « résiste »,
refuse de se laisser plier, engourdir. Et « dément ». Surprend.
Derrière la « grille de cases »,
de conventions à notre convenance qu’on lui appose d’autorité (et dans
lesquelles nos structures cérébrales, assez totalitaires, l’enferment), il
continue de vivre, d’être lui-même et, en un sens, de se dérober. Il s’y entend
– parfois de manière agressive, « choquante », voire « traumatisante »
- pour nous rappeler à notre nécessaire devoir de lucidité, de modestie, et de
prudence.
Le monde n’est pas tel que nous
voudrions qu’il soit, tel que notre désir le veut, et c’est très bien.
Le désir est condamné à être
insatisfait, bien fait pour lui (*).
Ainsi, le nécessaire renoncement à
son illusion qui s’impose s’écrit-il, se communique-t-il, en filigrane, à
destination des Hommes sages, ou de ceux qui tendent vers davantage de sagesse.
A eux, cependant, de savoir, et d’avoir
le vouloir de décrypter les implications qui se logent à l’intérieur d’un tel « message subliminal ».
(*)
Exemple patent : le mal-être psychologique qui frappe les sociétés d’abondance
et de « droit au bonheur ».
P. Laranco.
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