ZÉRO.
Après zéro, il y a 1 et -1, et puis ça grouille de nombres. Littéralement ad nauseam.
Et si zéro avait, plutôt, décidé de rester seul tel quel? Ou encore, s'il avait préféré se reproduire en se multipliant à l'infini ? Les nombres n'auraient jamais existé. Zéro aurait été, serait 0x0x0x0x0x0x0x0x0...c'est à dire zéro. Un beau zéro bien net. Un œuf. Qui n'aurait pas cessé d'être neuf.
Comment zéro est-il devenu 1 et -1 ?
Par mutation (au sens où l'entendent les biologistes, les généticiens) ? Dans ce cas, pourquoi, serait-on fondé à se demander.
Par solitude ?
Par ennui ?
Parce que, tout seul, il avait trop froid ?
Parce qu'autour de lui, il y avait largement la place pour tous les autres nombres ...un trop-plein de place?
Parce que le zéro originel avait horreur du vide et, par conséquent, ne s'aimait pas beaucoup ?
Voilà un problème de logique que je propose à tous les matheux. Reste à savoir, maintenant, s'ils seront en mesure d'y répondre.
Et pourtant, zéro devait sous-estimer sa propre beauté.
Sa stupéfiante perfection.
Quoi de plus beau que cet ovale parfait, refermé sur lui-même à la manière d'un Ouroboros (*) ?
Tiens, essayez de faire le tour de son dessin...vous ne vous arrêterez pas. Ce qui veut dire que le tour du zéro égale l'infini. Ce qui veut dire que le zéro n'arrête jamais de tourner autour de lui-même, comme une planète creuse.
Un patineur qui tournerait sur le dessin du zéro deviendrait une toupie. Peut-être, à la longue, pris de vertige, se renverserait-il à l'intérieur de l'ovale, qui l'avalerait tel une bouche. Les seules issues, avec le zéro, c'est d'y rentrer, ou d'en sortir.
A l'intérieur du zéro, j'imagine que tout est net, que tout est de silence blanc. Mais si vous m'en demandez davantage, je ne saurais vous répondre. Sans doute nous heurtons-nous là aux limites de la connaissance humaine.
Le zéro contient-il quelque chose - et si oui, quoi ? Ne serait-ce finalement pas lui qui aurait craché tous ces nombres ?
Je l'ignore. Et je redoute que, pour cette raison, le prof me colle un zéro !
Il me prend pour un âne et mes vieux me disent souvent "t'es un zéro !"
Mais figurez-vous que je rigole en mon for intérieur (qui est un vrai fort), car ça me flatte.
Parce que, comme je viens de vous le démontrer, zéro, ce n'est pas rien.
J'en ai assez qu'on lui colle cette étiquette péjorative. D'ailleurs, comment peut-on se trouver en mesure de coller une étiquette sur ce qui constitue le symbole de la non-présence ?
C'est cela, sans doute, que j'admire chez le zéro: il est non-présent. Pour les informaticiens, il repose juste auprès du 1; il y a 0 et 1, c'est tout. Shakespeare, lui, parlant en mots, disait "to be or not to be".
1 est. 0 n'est pas. Point barre.
Mais 0 a fait de la non-existence une façon d'être, non ?
(*) Ouroboros : serpent qui se mord la queue, en grec ancien.
Patricia Laranco.
2015.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire