mercredi 21 février 2024

Pour essayer de réfléchir...

 



Le capitalisme a fait de la vie humaine un vrai 

panier de crabes.













La vie est un chemin tout en arborescences.













Poésie et engagement.


Non, vivre en poésie, ce n'est pas vivre à part. Ce

n'est pas ronronner, au creux de sa petite bulle aux

rassurants rituels (et aux habituelles

courtisaneries).

ça a à voir avec la vie de la Cité. Cela implique un

"message" d'affranchissement. Il est normal que

le/la poète, ne serait-ce que de par l'étendue de sa

sensibilité, ressente le besoin de s'impliquer dans

les "choses du monde". et participe à la

"correction" de ce qui ne va pas. Être poète

s'accommode mal avec le fait d'avoir des œillères.

Ou de se laisser enfermer dans un confort, un

formatage - fut-il bourgeois ou fonctionnaire. Le/la

poète ressemble à l'enfant, qui déteste les injustices

et rêve plus que volontiers aux "utopies". C'est un

créatif.

La poésie, c'est un oiseau qui prend son envol, ailes

grandes ouvertes.

Et la société est un tout.

Pas de poète sans ENGAGEMENT. Sans

engagement de toute l'âme. Engagement sensoriel;

sensible; spirituel; sociétal.

Le/la poète, pour moi, est un esprit libre, donc

réactif.











La France, à ce qu'il m'en semble, n'est pas un pays

très très stimulant.

Est-ce un effet (lointain) des soubresauts de la

Révolution française, les élites, verrouillées,

intensément corporatistes et immobilistes (comme

l'est, d'ailleurs, une large partie du pays dans son

ensemble) redoutent instinctivement que le “gros

des troupes” se mette à leur disputer leur place, leur

prestige. Elles se comportent, curieusement, un peu

comme s'étaient comportées, bien avant elles, les

“privilégiés”, aristocrates ou clercs, de l'Ancien

régime moribond à la veille de la grande bascule.

On veut bien aider les “manants” à accéder à un

certain niveau de vie (lequel, au demeurant,

alimente le consumérisme et l'abrutissement des

masses ivres de “chacun pour soi” et d'hédonisme),

mais on ne tolère pas pour autant que puissants,

fortunés et experts perdent le sacro-saint contrôle.

On reste, en somme, paternaliste.

Une certaine “tradition” française stigmatise

l'ambition, le dynamisme, qui suscitent une

profonde méfiance. Ladite tradition arrange bien

ceux des hautes sphères inaccessibles et baigne,

pénètre également, dans une large mesure aussi, les

moins hautes (là-dessus, on peut dire qu'il y a, pour

une fois, un certain consensus, de nature tacite,

donc préconsciente).

La “moyenneté” (et peut-être, même, la

“moyennitude”) est devenue, en France, un idéal.

La France est, par excellence, un pays de classes

moyennes, aux aspirations moyennes, modérées,

modestes, “centristes” , qui aime bien vivre et, dans

le fond, n'en demande guère plus (en dépit d'une

certaine arrogance de façade, souvent reprochée

aux Français, à quelque milieu qu'ils

appartiennent). Et qui, auprès de cela, défoule ses

réelles tendances à l'énervement, à l'impatience

(sans doute dues au tempérament) en entretenant,

en son sein, un climat très présent de grogne

sourde, de déprime grincheuse aux accents

quelquefois paranoïdes.











Quid de l'image du poète ou de la poétesse en

France ?

Bien des gens (quand ils savent qu'ils existent, du

fait des “récitations” apprises, de force, à l'école ou

au collège et vécues, le plus souvent, comme une

légère forme  - légère -de torture) les perçoivent

comme ésotériques, ou prétentieux. En tout les cas,

bien élitistes. Sans doute en raison du souvenir plus

que mitigé qu'ils gardent de l'école, où ils se sont

ennuyés à mort (on se demande à cause de quoi, de

qui).











A propos de RIMBAUD, et de sa vénération.



Je ne crois pas, mais vraiment PAS que

RIMBAUD, cette espèce d'étoile filante, cette

exception subversive, explosive de la poésie, eut

aimé être devenu une idole des profs, une gloire

académique. Ce dont l'homme Arthur RIMBAUD

voulait se souler d'abord, c'était de LIBERTE. Sa

biographie (encore faut-il la lire) nous le dit bien :

jusqu'à la fin de ses jours, il envoya promener, avec

toute l'indifférence et le dédain dont il était capable

– ceux dont seuls sont capables ceux qui ont vu ce

que l'homme a cru voir- les tentatives officielles de

récupération, y compris celles que mena et tenta de

lui faire miroiter son fameux complice Paul

VERLAINE.

Si RIMBAUD a fini par se faire récupérer, ce fut à

cause des circonstances de sa fin de vie et de

l'avidité (d'argent et de gloriole) de sa mère et

surtout, de sa sœur, très prosaïques bourgeoises

rurales qui avaient fini par prendre la pleine mesure

de l'exceptionnalité, tant poétique qu'humaine tout

court, de son parcours tellement hors norme (que,

par ailleurs, jamais elles ne purent vraiment

comprendre, mais ça, tout le monde s'en doute).

Isabelle, pour Arthur – et sans doute, par ricochet,

pour elle-même – voulait le firmament de la

reconnaissance. (En bonne provinciale de l'époque,

elle était considérablement impressionnée par l'avis

de l'intelligentsia parisienne comme par l'intérêt

potentiel des autorités culturelles suprêmes; ces

perspectives lui mettaient, pour tout dire, des

étoiles dans les yeux.)

Et VERLAINE, survivant de leurs dérives

communes, le désirait aussi (générosité ? Reste

d'attachement ? Admiration réelle pour une œuvre

dont la découverte l'avait “secoué” ? Il y a sans

doute un peu de tout ça).

RIMBAUD, lui, se fichait de sa propre œuvre. Qui

l'avait déçu. Comme tout le reste. La quête seule lui

importait. Et il était passé à autre chose.

La consécration de RIMBAUD se fit, en quelque

sorte, SANS le vrai RIMBAUD. Pour ne pas dire,

même, malgré lui. Lui s'était juste brûlé les ailes au

feu d'une de ses multiples quêtes dirigées vers

l'inaccessible. Lui était juste un vaincu, un adulte

terrassé par la déception, brisé par ses propres

chimères, qui ne savait plus quoi faire de sa vie. Le

poème l'avait trompé. Le désert, l'Afrique de l'Est

même avaient, pour lui, pris des allures de mirage,

de leurre. Son long dérèglement [...] s'était, in fine,

soldé par un échec total.

La démarche de RIMBAUD était

fondamentalement utopique. RIMBAUD était un

chercheur enfiévré par sa propre recherche

(poétique, politique, intime).

Fondamentalement, Arthur RIMBAUD boudait et

esquivait le monde. Il repoussait toute idée d'entrer

dans ce que ce dernier pouvait avoir à lui offrir.

Cela ne lui suffisait pas. S'il fut le poète qu'il fut,

c'était parce que le monde lui était INCOMPLET.

Parce qu'il ne lui offrait nul mot, nul vécu qui le

satisfit (du moins d'une manière durable).

Jamais RIMBAUD n'a attendu après la moindre

vénération. Ce qu'il poursuivit - sans succès -

passait bien au large de tout médaille. Je crois qu'il

aurait ricané de la gloire qui est à présent la sienne.

Car il était très insolent. Et déroutant. Avant tout le

reste.

Cela, bien peu de gens, de son temps comme de nos

jours, se trouvaient ou se trouvent encore en mesure

de le réaliser. Ne serait-ce que de l'entrevoir.

Ainsi RIMBAUD était-il condamné à n'être

vraiment proche de personne. Ce qui le rendit

d'autant plus attirant, et perturbant du même coup.

Il ne se laisse jamais réduire.










P. Laranco.















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