L'association tient à vous rappeler qu'à l'occasion du Festival du Quartier du livre - du 2 au 9 juin à la Mairie du Vème arrondissement à Paris - vous pourrez enfin, en chair et langue vives, parmi poétesses et poètes invités au Territoire du Poème , rencontrer
Agnès Adda pour "LA FILATURE" (Éd. Unicité),
Marianne Auricoste pour "La maison des blés" (Éd. Al Manar),
Anne de Commines pour "D'étranges histoires rêvées par un livre" et "Vous sentez-vous à l'article de l'humour?" Éd Unicité
Maïté Villacampa "Le levain de l'inachevé, cante jondo pour Walter Benjamin" (Éd Unicité)
François Minod pour "AU PLUS PRÈS" (Éd Unicité)
Rébecca Gruel "La promeneuse du temps" (Éd. Unicité)
Philippe Tancelin pour " UN CIEL UN JOUR " (Catherine Jarrett/Philippe Tancelin Éd. Unicité) ...
la liste est longue, je ne cite ici que quelques noms;
vous dire aussi que notre chère grande poète Nadine Lefebure que nombre d'entre vous ont bien connue, aurait eu 101 ans ce 03 juin !
Et je vous livre avec plaisir le message de Francis B. d'Azay, secrétaire de " La clairière de Nadine" (Association des amis de Nadine Lefebure) ainsi qu'un poème inédit de Nadine : " Périples"
Avec amitié
Catherine Jarrett
F. B. d'Azay :
" Par la volonté des circonstances, nous réunir pour fêter autour de l'immortalité de ses œuvres la centième année de notre amie s'est avéré un projet irréalisable.
Hélas!... Cent fois hélas...
Espérons qu'en début d'automne nous pourrons apprécier, chers Membres de La Clairière de Nadine, une subtile programmation de ses poèmes et proses. Un spectacle-lectures est déjà en cours de répétition, mis en scène par Christian Deudon.
Nous vous tiendrons informés des date et lieu, vraisemblablement au siège de l'association.
L'an dernier j'avais porté à votre connaissance un inédit de Nadine, titré « Mon Festival de Cannes 1955 ». Trouvé également dans les archives que nous ne cessons de répertorier, classifier et sauvegarder, découvrez maintenant "Périples" :
Périples
Depuis longtemps on refuse, on se refuse systématiquement toute compagnie, sans rien changer aux cris intérieurs.
Il n’y a plus qu’à écouter la solitude qui se démesure dans une nuit dérivant en étendard.
Alors s’élèvent de véritables silences en plongée.
Nébuleuse à l’œil nu
Nébuleuse aux vertèbres de métal au ventre d’aspic, aux cheveux de palissandre à cinq branches
Nébuleuse, lézard de la nuit, scaphandre des ténèbres qui roule autour de la terre léopard de minuit
Nébuleuse en suspens crinière de filigrane aux griffes de neige et de phosphore, grise mine des clairs de lune
incendie des étoiles graminée de la nuit pistil de la lumière
Nébuleuse aux feux de paille, aux pailles de fer, aux vitrages et pluies de glaives et de cailloux
Nébuleuse sur fond amer, votre solitude m’étreint.
Nous renouons avec une solitude de douceur, avec l’ennui qui calfeutre ses cadavres, les ailes repliées sur ses
blessures. L’aile se déplie et se déploie en cerf-volant, le roulis ascensionnel des villages de montagne où monte
l’anémone des voyages et, le soir, les tourterelles du crépuscule.
Mais le silence a tout cassé dans les gares. Il nous force à parcourir un autre monde et nous arrivons aux aqueducs
pestilentiels de la mer.
Le fleuve pèle la terre comme une vieille pomme, le frotteur des marais salants, le blanchisseur de coquillages, le
pêcheur de grenouilles.
Les manœuvres d’écluse tombent à l’écluse, la lanterne du passeur de barque à quatre sous dessine verticalement
des clairières de nudité.
La lueur des phares et la file indienne des pays nordiques pour toute pâture, l’avenue du silence marginal des terres
d’argile creusées de rivières et de murs blancs, le vent qui se ménage des portes de sortie et rampe en travers de trop
de ponts, nous poussent sur un navire de trop de ponts, nous poussent sur un navire qui prend le large.
D’une nacelle à l’autre, un grand désespoir sourd-muet tombe du ciel.
Mais sous les palmeraies, je célèbre l’idole cœur à cœur silencieux.
Je désire l’idéal au silence de vautour qui s’en revient des printemps polaires. L’idéal des visages simples qu’on ne
voit pas dormir la nuit au long des quais. Celui des sentiments inédits qui marquent la surface des eaux. Des grands
trains de granit charrient le soir des barrières pures et les mythologies des rues prennent des sens étonnants.
Il serait temps de s’astreindre à la cruauté car me voilà de toute évidence affranchie. Me voilà prête à offrir un
bourreau à la solitude qui s’effrite autour d’un insaisissable visage. Les mirages de la rêverie et de silences
nouveaux ouvrent leurs ailes à qui veut les entendre.
Mais à l’intérieur des villes, tout ce qui change la mer et des choses qui partout ressemblent à des déraillements,
décrochent l’équateur du sang.
Muette soirée de désir
Intérieur intérieur intérieur intérieur intérieur
Limitation
Limite
Limitation à la vie
Solitude ultime rivage
Myriades solitudes multiples que je compte au débraillé des étoiles.
Vide solitude qui prend la forme de mobiles immolations grises, célèbre et seule à souhait, mauvaise solitude, je te
ferme en solstice d’été sur les marais, le couchant, la décadence saisonnière des rivages intérieurs.
Nous mourrons tous dans les déserts embués où plusieurs sortes de solitude en solstice d’été agrippent les passants.
Nadine Lefebure.