mardi 24 mars 2020

Richard TAILLEFER (France).
























Ne renonce jamais à ton voyage



1
Tu parles d’un retour aux sources. D’un retour à ta source. Pas d’un repli sur soi mais d’un repli en soi. Souviens-toi de tes rêves d’enfant, ces gestes singuliers un matin devant le portail de ton école communale, tout encapuchonné, tes pas dans les premières neiges. Plein d’espèr à ta fenêtre, les volets grands ouverts. Au pied de ta parcelle ton petit lopin de terre.

Tes yeux brillent. 
On dirait que le temps s’est arrêté.

Une rangée d’arbres là-bas au loin
Passe, oiseau passe
Vois ce que je ne sais voir.




2
Sur la plus haute branche l’oiseau se pose. Chante mon bel oiseau chante ! Moi, j’écris, je suis en train d’écrire. Un chemin se dessine, ronces et liserons s’y croisent. Je songe à travers ma lucarne, à ceux que j’aime et observe l’horizon, les quatre océans. Là, où la lumière à chaque ronde, tangue et fait la nique, à la lune paresseuse et au soleil fougueux. Je souris, le bon sens n’est qu’un gémissement d’âme.

Seul, 
Dans l’oisiveté de la chambre, 
J’énumère l’ordre insaisissable de ma vie.

Je cherche désespérément un signe
Un frère qui me ressemble
Un dimanche de sable blanc.




3
L’oiseau passe et j’oublie. Je ne retire rien, ne rajoute rien. J’apprends à passer. Je regarde en face, ce vieil olivier qui s’accroche et demeure. Ce restant de vie qui attend les dernières fleurs, le dernier fruit. Au loin, toutes ces maisons blanches, avec la fumée entre les branches. Une lumière ici où là et puis une autre.

Tous ces papillons de nuit dans mes rêves. 
Une lampe solitaire achève de brûler.

C’est le vent qui passe 
Passera encore

J’écoute
Ce que je ne dis pas.




4
Mon espace n’est pas plus grand qu’un modeste mouchoir de poche. Longtemps j’ai vécu comme un oiseau en cage. Ne me retenez pas, je m’en vais si loin, si loin, sans arme ni bagage, que nul ne pourra m’atteindre. J’emporte avec moi toutes les couleurs du temps avant qu’elles ne se fanent. Ces choses impossibles que nous cherchons en vain.

La route sera longue. 
Ignore les remparts, les garrigues de la discorde.

Comme papier qui vole
Ne renonce jamais à ton voyage.















Richard TAILLEFER




























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