jeudi 3 septembre 2020

Un très beau texte de la poétesse française Edith BERTHUIT.




Marcher comme toujours au bord de la vie, respirer l’étendue, 
entrer un instant dans le bois. Et sourire.
Y retrouver les corridors du temps, opaques et brefs, 
serpentins 
ou raides, pentus et tortus. Et se perdre dans les répliques 
et les accumulations des sentes illusoires que terminent clairières et taillis.
Rêver dans l’intensité verte d’une semi-obscurité où apparaissent, 
s’évanouissent et renaissent des lambeaux de ciel sans durée.
Se retrouver nulle part, n’être qu’ici, prise à la gorge par l’éphémère 
d’une existence qui s’écoule en dehors de nous.
Ne plus savoir si l’on peut inventer son chemin en l’arpentant. 
Laisser la mémoire préluder quelques parcelles d’avenir en poèmes.
Et, songeant à la lumière crue d’une plaine sans arbre, découvrir 
les ruines d’une bâtisse perdue dans les broussailles : révélation 
d’un passé vivant égaré dans la masse touffue des fûts.
Et dans le craquement des brindilles sur la mousse se savoir entourée 
des âmes trépassées dans le jeu violent d’ombres et de lumière 
si propres au sous-bois, quand les feuilles chuchotent entre elles 
des secrets inavouables. Il faut alors dresser l’oreille aux notes 
des passereaux, ouvrir les yeux à la digitale qui élance ses clochettes 
contre un tronc abattu, enfoncer les pieds au duveteux des mousses.



On devrait ne jamais regagner le logis, ne jamais avoir à écrire 
le vu ni le senti. On devrait pouvoir ne vivre que l’éternité des instants.






































Edith BERTHUIT
Été 2018




































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