Attendre
est un désert de sable et de lumière, d'espace trop blanc qu'il faut apprendre
à aimer.
Trop de bonheur matériel, trop de sécurité et
trop de liberté individuelle nous ramollissent-ils ? Nous affaiblissent-ils dès
lors qu'un péril majeur, une catastrophe subite, tout à coup surgissent et nous
mettent au défi ? La "civilisation" ne nous endort-elle pas sur nos
lauriers ? La voracité du "progrès" ne se retournerait-elle pas
contre nous ?
Ce qui frappe chez le vivant, c'est
son acharnement à être, à continuer à être. Tout, dans son comportement, semble
confirmer l'intuition de Spinoza. "Persévérer", s'opposer, sous
toutes les formes possibles, à l'entropie.
C'est, hélas,
dans les moments de crise qu'on prend le mieux la pleine mesure du degré de
déni ou d'inconscience égocentrique, ou, à l’opposé, de celui de
responsabilité, de solidarité civique (sens du devoir) de tout un chacun.
Tant que les sociétés humaines seront
irrationnellement misogynes, il leur manquera, sans doute, quelque chose. Il
leur manquera toute une dimension – énorme – de l’humanité (que les Chinois
nommaient la « deuxième moitié du Ciel »).
Je continue à
comprendre mal pourquoi on s’accroche à la vie, pourquoi l’on cherche toujours
à prolonger son temps d’existence, quand l’on a une descendance que l’on a
proprement élevée. D’où vient cette peur de disparaître, sinon, sans doute, de la conscience individuelle
d’exister qui est probablement propre à Homo
sapiens entre toutes les espèces vivantes ? La force de nos liens
sociaux y est aussi sûrement pour quelque chose. Nous ne voulons pas quitter,
« abandonner » nos proches parce qu’ils nous aiment et que nous les
aimons. L’amour-propre et l’amour de l’autre. L’idée de néant et ses
vertiges ; la perception de ce qui nous dépasse : de ce qui
« défie » notre orgueil, notre espèce de mégalomanie.
Il faut croire que la conscience d’Homo sapiens est une sorte de rupture.
Il est plaisant
de constater l’existence, en France, de certains hommes dont le « progressisme » à tout
crin, l’ « esprit éclairé » voire même le
« révolutionarisme » (en tout cas verbal) subit un coup d’arrêt
brutal là où commence – là où DEVRAIT commencer – la lutte contre certaines
conduites masculines portant atteinte à la liberté des femmes : le
« droit de cuissage » et le chantage sexuel sur les lieux de travail
n’existeraient pas, pas plus que le harcèlement, lui aussi sexuel, partout dans
l’espace public ou même au domicile de la « proie » qui quitte ou se
refuse, sous forme téléphonique ou autre. Le fait que certains hommes ne soient
pas en mesure d’avoir avec les femmes d’autres rapports que des rapports plus
ou moins colorés de convoitise érotique n’est qu’une vue de l’esprit, un
fantasme de féministe fanatique atteinte d’androphobie aigue, à moins (autre
version) qu’il ne soit « naturel » (dû aux phéromones ?...) et
donc « incontrôlable ». Tout le monde (peuple, Noirs, homosexuels,
transsexuels même) aurait le droit de
« faire des vagues », de contester l’ordre millénaire ou séculaire de
la Loi du Plus Fort tellement injuste…tous,
sauf une seule catégorie (paraphrasons ici l’ « Astérix » d’Uderzo et
de Goscinny) : les femmes. Et il faut être un « imbécile d’Américain
(ou de Québécois) » pour penser le contraire. Ou une femme (de n’importe
quelle origine) qui ne comprend pas que ces agissements relèvent de la
« séduction » et de l’Amour du Beau-sexe placé sur piédestal.
Il y a des Blancs
qui ne comprennent pas le privilège d’être Blanc.
Comme il y a des
hommes qui, en tant qu’hommes, bloquent eux aussi sur certains problèmes, par
égoïsme, par « névrose », par défaut d’empathie réelle.
Demandez un peu
aux femmes de se confier sans tabous, sans peur de « mettre les pieds dans
le plat » (du moins, à celles qui n’ont pas eu la chance de pouvoir se
glisser « entre les gouttes »). Demandez-leur, un peu, de parler de
ce sentiment de pression, de peur permanente, si ce n’est de trauma qui a assombri leur existence et, dans
certains cas, l’a complètement cassée, lorsqu’elles ont atteint « un
certain âge ». Demandez-leur, un peu, de parler de ce qui, dans le cas
contraire, imbibe leur quotidien, surtout lorsqu’elles ont l’insigne bonheur
d’être « sexy ». Mettez-les suffisamment en confiance, afin qu’elles
se montrent vraiment sincères…
En France, l’esprit de contradiction
est, bien souvent, le fruit d’un prurit égotiste. Il s’agit là de s’affirmer.
De montrer que l’on a son mot à dire.
Au risque de dire n’importe quoi. Ce
risque, on est toujours prêt à le prendre.
A l’heure qu’il
est, les gens détestent qu’on leur rappelle ce qui va mal, ou ce qui laisse à
désirer.
Pourquoi vouloir
changer un monde où EUX mènent une vie sans grands problèmes, où EUX mangent
généralement plus qu’à leur faim, peuvent se faire soigner correctement,
efficacement et s’instruire de façon convenable, ne subissent qu’une violence
en gros minimale, marginale et ont la liberté d’exprimer leur opinion, d’aller et
venir comme bon leur semble ? L’empathie et, plus encore, le « devoir
d’empathie » deviennent encombrants, et d’autant plus encombrants que, de
nos jours, les médias libres ne cachent plus rien de ce qui se passe partout
dans le monde.
La plupart des pays
où règnent l’opulence des biens matériels, la sécurité des personnes, l’accès à
l’information, l’avance d’ordre technologique, scientifique et médical (Chine,
Japon, Corée du Sud, Singapour, Hong-Kong, Taïwan et les Emirats arabes
exceptés) sont, de plus, de culture chrétienne et humaniste. Le christianisme,
on le sait, plus que toute autre religion, cultive une certaine éthique :
celle du « péché », de l’examen de conscience et de la culpabilité
fautive. La mauvaise conscience est particulièrement pesante au chrétien.
L’ « Esprit
des Lumières », promoteur des Droits
de l’Homme lui aussi, a vu le
jour en Europe de l’ouest, en sorte que l’idée et la revendication d’égalité
hantent les esprits dans toute la sphère dite « occidentale », et
particulièrement en France.
Paradoxalement,
depuis la deuxième moitié du XXe siècle, le triomphe de l’injonction de «
développement » économique et de bonheur individuel, essentiellement promue par
les U.S.A, cette nouvelle version de l’Europe marchande, a modifié le rapport
de l’Occident à la mauvaise conscience, qui est passée, de l’état de valeur
cardinale, à celui de « maladie honteuse rampante », névrotique car
menaçante pour l’épanouissement et la recherche du bien-être.
De quelle façon
concilier explosion développementale due, entre autres, à une mondialisation
forcée entreprise dès le début du XVIe siècle et assortie du pillage massif de
continent entiers placés sous le joug colonial (toutes les Amériques ;
l’Afrique noire et l’Afrique du Nord ; le Moyen-Orient, le sous-continent
indien et une bonne partie de l’Asie du Sud-est, archipels compris ;
l’Australie et la Nouvelle-Zélande) et grandes valeurs humanisantes ? Le
problème se pose toujours en ce moment même, « enrichi » (si je puis
dire) au combien et au combien dramatiquement de la problématique
environnementale, qui vire à l’urgence.
L’Occident,
dominant suprême, a forgé trois générations accoutumées et enivrées par le
fantasme d’une possibilité de jouissance exponentielle.
Une seule solution.
Laquelle ? Un déni, voisin du délire.
80% des sept
milliards d’humains qui peuplent (fort invasivement) cette brave planète vivent
(survivent) au-dessous du seuil de pauvreté, tandis qu’affiches publicitaires
et vieux postes télé d’occasion ou ramassés dans les décharges puis bricolés
ensuite agitent devant eux le susucre des villas paradisiaques à piscines et
saunas privés, du high-tech dernier cri, des bagnoles les plus futuristes et des supérettes croulant sous des montagnes
de marchandises, toutes plus variées les unes que les autres.
Pour que la
société marchande telle qu’elle est devenue maintenant perdure, il faut éduquer
les personnes lambda à réclamer « toujours plus ! » sans s’en
sentir coupables, parce qu’elles « le valent bien ». Et les gens,
bien conditionnés, font ce qu’on leur demande : ils demandent. Ils ne
supportent plus la moindre frustration, la moindre ombre au tableau, la moindre
limite.
Zéro manque, zéro
risque, zéro « prise de tête », zéro malaise à l’horizon ! Les
occidentaux sont devenus des « petites natures » encoconnées dans
leur confort, et ce tout particulièrement du côté est de l’Atlantique, dans
cette bonne vieille Europe opulente, pacifiée, protégée des fléaux majeurs qui
ronronne dans sa belle petite routine pas mal frileuse, très
« middle-class » et où l’on exagère facilement les plus menus tracas.
Alors, dans tout
cela, le « Tiers-monde », le « Quart-monde », le gouffre
entre populations dominantes et majorités (invisibles) dominées, les prédations
génocidaires, esclavagistes, colonialistes, postcoloniales dont l’état de fait
actuel est la conséquence…que voulez-vous que l’on en fasse ? Tout ce
qu’ils font – même par leur simple évocation, leur simple rappel –
« plombe l’ambiance ». Ils ramènent la vieille culpabilité chrétienne
rongeuse, malaisée à « gérer » sur le devant de la scène. Ils
entament l’image positive, glorieuse de
soi-même, ce qui est vécu comme une atteinte très malvenue au sacro-saint
confort (ici, dans sa version morale).
Pour obtenir
« toujours plus ! », on a pris le pli de se victimiser, en tout
cas au pays de Voltaire…et le tour est joué, on finit à son tour par se voir, par se percevoir comme une victime ! En France,
la position de privilégié a, depuis le séisme révolutionnaire fondateur de la
fin du XVIIIe siècle, particulièrement mauvaise presse. Fidèle à son Histoire,
le Français, quelque soit sa position sociale et son niveau de vie réels, a une
saint horreur de devoir admettre qu’il est du côté de « ceux qui ont ».
Plus qu’aucun autre peuple, il ne veut pas entendre parler des pages les plus
sombres de son Histoire, et souffre en sus de ce
qu’on pourrait appeler le « complexe du modèle, du magister ». Il
ignore – ou affecte d’ignorer, je ne le sais – qu’aucun peuple n’est sans
reproche, pas plus qu’aucun individu.
L’Homme aime à fréquenter des gens
qui ont le même comportement que lui entre autres parce que la sensation d’ « affinités »
que cela lui procure le rassure (le poids du nombre !) sur la « justesse »
de ses manières de vivre et de ses réactions et, ainsi, lui évite tout doute,
toute éventuelle tentation de remise en cause.
Se sentir faire partie d’une « communauté »,
ça réchauffe toujours.
On m’a appris l’humilité.
On me l’a transmise comme valeur.
Je considère que
c’est une force.
L’hypocrisie et le mensonge sont
partout. Ils sont les socles de tout équilibre
social. Alors, parfois, il n’est pas
rare que j’en arrive à me demander pourquoi on les vilipende tant.
A en croire un documentaire
scientifique diffusé par la chaîne ARTE il n’y a pas si longtemps, les
chercheurs en neurosciences se demandent même si la ruse n’aurait pas « boosté », chez les Hominidés, l’intelligence.
L’hypocrisie suprême n’est-elle
pas dans le blâme qui pèse sur l’hypocrisie ?
Tant d’obstacles
se dressent sur le chemin de la compréhension réelle de l’autre !
Rien ne vexe plus quelqu’un tant que
de lui faire une observation, une réflexion touchant du doigt un comportement
ou un trait de caractère qui, chez lui, s’écarte tant soit peu de l’image
idéalisée de lui-même qu’il cultive.
P.
Laranco.
La misogynie (en pensée, parole ou acte(s)) est
un véritable déshonneur pour l'humanité. C'est un truc qui la souille. La
misogynie (en pensée, parole ou acte(s)) est un véritable déshonneur pour
l'humanité. C'est un truc qui la souille.
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