Que nous rappelle une
maladie – une infection, une épidémie par exemple ?
Que l’être est, avant
toute autre chose, un assemblage d’éléments infiniment petits qui, sans doute
parce qu’ils y « voyaient » leur intérêt, se sont regroupés et ont
accepté de s’associer, de travailler ensemble en formant une organisation
émergente.
Qu’il suffit que ces
minuscules éléments biologiques aux origines physiques et chimiques (atomes,
molécules, cellules) deviennent tout à coup les cibles d’un autre élément tout
aussi microscopique (parfois même, plus) qu’eux pour que la « société »,
l’ « usine » chimique et biologique ultra-organisée et ultra-complexe
qu’ils ont constituée ensemble, étroitement unis, courre le risque de s’effondrer,
de s’écrouler tel un château de cartes, ou encore que l’un de ces mêmes
composants basiques au possible, devenu soudain farouchement « individualiste »,
soit saisi d’une forme d’indiscipline, de révolte qui le pousse à ne plus « rouler »
que pour lui-même pour qu’une prolifération envahissante, cancéreuse
compromette mortellement l’équilibre de l’organisme global.
Que l’infiniment petit (à
nos yeux) conditionne souvent le sort de l’infiniment grand ou de notre propre
échelle, qui sont d’ailleurs ses résultantes.
L’ennui lui-même n’est qu’impression,
illusion, car, à bien y regarder, nul jour ne ressemble à un autre. Il y a
toujours – où qu’on veuille le trouver – du renouvellement, quelque, quelques
détail(s) qui, même à nos propres yeux, construisent sa différence. Pour ne
plus s’ennuyer, il faut, par conséquent, changer de regard. La banalité, la
platitude de l’ennui, l’assimilation que nous en faisons avec une morne plaine
de routine répétitive et incarcérante, indigne que l’on y prenne garde,
n’existe que dans notre esprit ; c’est une donnée exclusivement liée à la
structure de la perception humaine et, bien sûr, à une culture humaine donnée
qui a imposé certaines valeurs.
Certains vivront une même situation
comme de l’ennui ; d’autres, pas du tout.
L’espoir, parfois, a quelque chose de
« satanique ». On l’a bien vu, par exemple et entre autres) au XXe
siècle, au moment des accords de Munich.
Ce n'est pas parce que l’Homme attribue
du sens à tout que tout a un sens. Les neurosciences ont prouvé que trouver du
sens était une tendance de son cerveau.
Si les gens plus intelligents que la
moyenne sont peu – ou mal – aimés, n’est-ce pas, peut-être, parce qu’on peut
les tromper moins facilement ?
Juger les autres.
Cela rassure. Cela place en position
de « parfait ».
Je ne peux pas dire que j’aime la
vie. Encore moins que je la déteste.
En tant que vivante, je n’ai rien
d’autre avec quoi la comparer.
Je la vis. Je suis dedans. C’est
tout.
Quand on réalise qu’après tout, tout
est vain, d’abord, on est désespéré, il est évident que l’on
« plonge » ; puis, ensuite, après un temps plus ou moins
variable, il se peut, dans le meilleur des cas, que l’on devienne solide et
inébranlable comme il est difficile d’imaginer. Comme un menhir où rien ne
vacille.
La vérité ne caresse pas les gens
dans le sens du poil.
C’est – du moins le crois-je - en se
libérant de soi-même autant que cela lui soit possible que l’être humain sera à
même d’élargir son horizon et de faire progresser sa compréhension et sa
pensée.
Se libérer de soi-même…en tant
qu’égo, que simple individu borné…mais également, en tant que représentant de
sa propre espèce, limité par les caractéristiques propres à cette dernière.
Se projeter dans l’avenir est,
dit-on, le propre de l’Homme. Mais l’avenir est un réservoir d’événements
subits, brutaux ou, en tout cas, difficilement prévisibles hors des
modélisations informatiques de certains spécialistes.
Sachant cela, je ne fais, pour ma
part, à l’avenir qu’une confiance assez
restreinte.
Et puis, l’Homme oppose volontiers le
déni aux éventualités qui le dérangent ou aux perspectives qui l’effraient
(même quand celles-ci, d’ailleurs, se sont déjà concrétisés). Il veut
« avancer » et, pour cela, il a besoin d’un minimum de confiance en lui
et en le monde qui l’entoure.
Reste que déni et confiance en la vie
engendrent l’insouciance. Et que, de l’insouciance à l’imprudence, il n’y a
souvent qu’un pas.
Pour mieux comprendre le monde, il
faut toujours se tenir à sa marge, le plus extérieurement possible. Position de
l’observateur !
Je dois avouer que l’éphémère
m’inquiète.
Comment s’attacher à quoi (qui) que
ce soit sans garder à l’esprit qu’on court le risque de sa perte ?
N’est-on pas, en quelque sorte et en permanence, « trahi » par
l’ « infidélité », l’insaisissable agilité de chaque minute
mouvante ?
Le cerveau humain désigne, classe,
catégorise, comble les vides ; c’est sa façon de fonctionner. Mais est-ce
une démarche propre à « coller » de si près que ça au réel ?
Souvent, ce dernier nous déroute (il
déroute même les plus grands de nos esprits, les astrophysiciens majeurs, par
exemple) de par les exemples d’ambigüité et d’incomplétude qu’il offre en
nombre.
Comment « connaître » le
monde (pour autant que cela nous soit possible) sans connaître, peut-être
D’ABORD, le fonctionnement de la perception humaine ? N’est-ce pas là ce
que l’on appelle « mettre la charrue avant les bœufs » ?
La réalité n’est-elle pas, avant
toute autre chose, une perception ?
En Occident, l’on aurait plutôt
tendance à plaindre ou à moquer la sagesse. En effet, un « sage »,
revenu de tout, fait un piètre désirant. Sa haute compréhension, sa béatitude
le placent, au demeurant, à l’abri de tout manque.
Voilà qui n’arrange guère les
affaires de l’esprit marchand, du capitalisme, de la consommation exponentielle
de biens matériels, de la « croissance » économique telle que la
conçoivent les tout-puissants occidentaux actuels.
Il n’en va pas du tout de même, dans
le fond, de la pensée orientale classique. L’Hindou vit la sagesse comme un
état de délivrance, de libération (mokcha), tandis que le taoïste et même le
confucéen chinois l’associent immanquablement à un certain sens de l’équilibre
(tant cosmique que sociétal, mais les deux dimensions sont liées). Donc, ici,
moins il vous reste d’illusions, de leurres, mieux vous vous portez, plus vous
êtes « fort ». L’espérance fait elle-même partie des choses dont un
philosophe, un penseur ont le devoir de se méfier, et qu’ils ont l’obligation de maintenir à
distance. L’Homme est à parfaire et seuls l’intériorité ou le contrôle de soi à
des fins d’équilibre social ou de libération spirituelle se trouvent valorisés, mis en exergue.
Prise de distance face à soi et à la
vie et renoncement seuls aident l’être à vraiment « grandir ».
Rien de plus éloigné, ainsi qu’on le
voit, de l’individualisme hyper analytique propre à l’Occident.
En Orient, l’individu n’est autre
qu’une des parties d’un tout, d’un ensemble. Beaucoup plus vaste. Dans la
tradition indienne, il doit tendre, dans l’idéal, à rejoindre, par la
méditation, autrement appelée yoga, le tout cosmique et spirituel dont il fait,
par essence, partie afin de reprendre conscience de sa véritable nature qui lui
a été voilée (rapport âtman/brahman). Il en va, apparemment, un peu de même
dans le courant de pensée taoïste (ou daoïste) chinois. Dans le confucianisme,
certes plus pragmatique, il reste indissociable de sa société et des devoirs
qu’elle lui impose (ancêtres, famille, soumission à l’autorité étatique quand
celle-ci est harmonieuse, équilibrée, juste et qu’elle œuvre, donc, pour le
« bien », qui est stabilité, cohésion, absence de chaos, de désordre
favorables à la prospérité).
Il y a trop de façons différentes de
voir le monde, et le moindre élément du monde pour que nous y voyions clair.
Trop de complications partout (y
compris à l’échelle cosmique) pour que nous dégagions des schémas simples.
C’est drôle, quand même, de voir les
Hommes vivre comme si la mort n’existait pas, comme s’ils se trouvaient voués à
l’éternité, en somme. La mort les étonne toujours, eux, ces pourtant sages
(« sapiens »), si intelligents, si logiques.
La vie est un immense brassage de
hasards et de possibles. Son sens, son essence, son « point central »
se déplacent sans interruption.
L’instant n’est jamais que
l’instant…et il ne nous est pas fidèle.
Dans nos sociétés, les nouveaux
pestiférés ne sont autres que ceux qui souffrent. La nature humaine est
tellement mimétique qu’on les fuit, qu’on refuse de s’intéresser à eux, au cas où
cela « déteindrait », comme une maladie honteuse. A force de
combattre le mal-être (tant physique que moral), la médecine l’a diabolisé. De
plus en plus américanisé, l’esprit de la « modernité » à transmué le
fameux « pursuit of hapiness » en New-Age, ou encore en
« développement personnel », ou encore en « pensée
positive » - qui ont tous valeur de synonymes – et les impose à présent
d’une façon massive, péremptoire, comme solutions à tout.
Celui qui souffre moralement à
l’intérieur de notre société « florissante » si apte à nous protéger
de la solitude est, à l’instar de l’individu en surpoids, quelqu’un qui se
« laisse aller », un « loser », et c’est là chose
impardonnable.
Aucun obstacle ne doit entamer notre
force morale, notre « fighting spirit » ; c’est l’Amérique qui
l’a dit. Au nom de son « esprit pionnier ». L’Amérique qui, pourtant,
regorge de tueurs de masse, de serial killers, de poor workers et de gens qui
vivotent dans des mobil-homes fatigués, quand ce n’est pas dans leur voiture ou
dans la rue. L’Amérique qui cultive, par ailleurs, une culture de la violence
et un darwinisme social inégalés
dans le groupe (restreint) des nations les plus prospères et les plus
« développées » de cette planète.
Être l’autre, avoir ce qu’a
l’autre…étrange obsession humaine !
Le propre des élites n’est-il pas de
rester encore plus « entre soi » que les autres, et donc, de snober
tout ce qui ne fait pas partie de leur cercle et qui s’approche trop près d’elles ?
Vous parlez tous, toujours, à
tire-larigot, de DROITS, de DROITS, de DROITS… droits par-ci, droits par-là, en
veux-tu, en voilà…Vous n’avez que ce mot en bouche.
A ceci près que ceux qui doivent
défendre leurs droits, ce sont toujours les faibles. Et que ceux qui ont les
moyens de leurs droits, ce sont toujours, comme depuis toujours, les forts.
Le poids social contourne les lois et
les grands principes gravés sur des stèles de pierre sans nulle peine.
On peut, dans ces conditions, se
demander à quoi tout ce (faux) « carcan » de lois rime. Même pas à
bourreler de culpabilité les puissants et/ou les débrouillards bien outillés
qui le contournent.
P. Laranco.
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